Après avoir survolé la saison 2022-2023, Johannes Boe sera-t-il de nouveau seul au monde ?
Seize victoires, 18 podiums et quasiment 500 points d'avance sur son compatriote Sturla Laegrid au classement général de la Coupe du monde : Johannes Boe n'a laissé que les miettes à ses rivaux. Seul Vetle Christiansen a existé en individuel et en mass-start où il a pu s'adjuger les petits globes de la spécialité. Pour le gros globe, il n'y a pas eu besoin de recourir à la photo-finish : depuis la retraite de Martin Fourcade en 2020, le biathlon masculin est archi-dominé sur la Coupe du monde par la Norvège.
Si Quentin Fillon-Maillet a réalisé une saison 2021-2022 sensationnelle pour s'adjuger le gros globe de cristal et remporter 5 médailles olympiques dont deux titres, l'exercice post-Pékin a été rude pour le Jurassien, quasiment inexistant, notamment en raison de difficultés physiques et dissensions en interne qui ont conduit à un remaniement du staff des Bleus à l'intersaison.
Boe, 3 ans pour égaler Fourcade
Ce n'est pas toujours simple de s'exiler, surtout quand c'est pour apporter son savoir-faire au rival numéro 1. Sigfried Mazet est assurément une référence dans le monde du tir. Vincent Jay et Martin Fourcade ont notamment été ses élèves et son départ pour la Norvège ne pouvait être digéré facilement.
Et quand, en plus, la Norvège dispose d'un vivier inépuisable, avec des biathlètes qui pourraient également s'aligner sur des épreuves de la Coupe du monde de ski nordique, il devient impossible de lutter. La supériorité norvégienne a évidemment été éclatante sur le relais avec 5 victoires en 5 courses. Quasiment la moindre des choses quand 5 de vos biathlètes figurent au 7 premières places du classement général.
Cette saison encore, Johannes Boe sera favori à sa propre succession. À 30 ans, il est au faîte de sa carrière. Désormais quadruple vainqueur du général, il n'a plus "que" trois gros globes de retard sur Martin Fourcade, soit autant de saisons qui le séparent des Jeux olympiques de Milan Cortina en 2026. Vu sa dynamique, et même en prenant de l'âge, sa supériorité sur les spatules et derrière la carabine lui permettent de voir loin.
Une concurrence étrange dans l'expectative
Les Norvégiens sont les premiers rivaux du cadet de la fratrie Boe mais quid de la concurrence extérieure ? En ce qui concerne Fillon Maillet, difficile encore de connaître son état de forme. Victime d'un énorme coup de fatigue en juin, il a raconté dans les colonnes de L'Equipe sa mésaventure à l'hôpital alors qu'il avait fait une réaction allergique à un produit injecté avant de passer un scanner : "soudain, j'ai vu s'agiter une dizaine de personnes autour de moi avec un défibrillateur, du matériel pour intuber".
Dès lors, QFM avance dans l'inconnu, même s'il a gardé le rythme des séances de musculation et que le retour de Jean-Pierre Amat comme patron du tir l'a mis en confiance après une saison irrégulière et décevante : "tout ça fait que j'ai aujourd'hui des repères un peu biaisés, estimait-il. Mais je reviens avec une grosse motivation après cette période de doute. C'était une phase difficile, mais ce n'est pas comme si j'avais coupé deux mois dans mon entraînement". Revenu d'un break commencé dès février, Émilien Jacquelin pourrait revenir sur le devant de la scène et retrouver son niveau de 2022 quand il était numéro 2 mondial. Mais pourra-t-il tenir la distance ?
Sans Benedikt Doll qui a pris sa retraite au terme de la saison dernière, le contingent allemand sera représenté en première ligne par Roman Ress, 9e du général. Le Suédois Martin Ponsiluoma, champion du monde de sprint en 2021 et en argent sur la mass-start des JO 2022 et des derniers Mondiaux, arrive à maturité. À 28 ans, le 5e du général doit gagner en régularité dans l'excellence mais l'exercice 2022-2023 a démontré qu'il avait franchi un palier, avec une victoire sur l'individuel de Kontiolahti et 5 autres podiums.
Pour autant, à l'aune de cette nouvelle saison, difficile de voir un biathlète capable d'aller chercher Johannes Boe à la régulière.
