NBA Playoffs : les Suns éliminés, parce qu'associer des joueurs ne fait pas une équipe
La nuit dernière, les Phoenix Suns ont conclu leur saison NBA sur une déroute contre les Nuggets, et à domicile qui plus est. Une fin en queue de poisson, pour la deuxième saison consécutive. Et à chaque fois, une immense déception, mais pas pour les mêmes raisons.
En 2022, Phoenix avait survolé la saison régulière, mais s'était pris les pieds dans le tapis de façon totalement inattendue en playoffs. Cette saison, on l'avait senti un peu plus venir, mais les espoirs étaient sans doute bien plus grands. Et maintenant ?
Un risque pas calculé ?
Le 9 février dernier, tremblement de terre sur la planète NBA. Kevin Durant est transféré aux Suns, terminant l'explosion des Nets après le départ de Kyrie Irving pour Dallas. La perspective d'un duo avec Devin Booker fait saliver tous les observateurs. La foule s'embrase, la côte pour le titre chute de façon incroyable.
Phoenix a des ambitions après l'échec de 2022. Mais à ce moment-là, personne n'imagine autre chose qu'une finale NBA. Cependant, il faut se poser une minute et regarder la contrepartie. Outre des tours de draft à gogo, trois joueurs prennent l'avion pour Brooklyn : Mikal Bridges, Cameron Johnson et Jae Crowder.
Point commun entre ces trois éléments ? Ce sont tous des postes 3-4. Et l'on se dit qu'il aurait peut-être fallu y réfléchir à deux fois. Il était impensable de ne pas lâcher Bridges, pièce centrale du trade en raison de son statut de star en devenir. Et Jae Crowder était mis au banc depuis le début de saison. Mais Cam Johnson ? Une grosse perte pour la profondeur de banc.
Une perte qui s'est clairement matérialisée dans la série face aux Nuggets. Car Monty Williams n'a jamais réellement trouvé le complément de KD sur les ailes. Josh Okogie n'amenait pas assez offensivement, tout comme Torrey Craig. Et TJ Warren, ancien de la maison qui était venu dans les bagages de KD, a été fantômatique.
Globalement, c'est tout le banc qui était totalement absent. Et quand on regarde les noms, ça laisse rêveur. Cam Payne a sorti un game 6 monstrueux, mais les 5 premiers étaient totalement ratés. Landry Shamet, Damion Lee, ce n'est pas assez. Recruté pour un push, Terrence Ross a très peu été utilisé. Il n'y a pas un réel 6th men capable de contribuer de façon régulière. La série de Bruce Brown pour les Nuggets, sans être impressionnante, a compté bien plus chez les Nuggets.
Une défense, cela se construit
Bien sûr, il est facile de tirer ce genre de conclusions une fois la saison terminée. Mais ce qui est sûr, c'est que constituer une équipe, cela ne se fait pas en deux mois. À peine arrivé, Kevin Durant s'est blessé bêtement et a passé la moitié de son temps à l'infirmerie. Ce qui n'aide pas à créer une cohésion.
Certains pourront rétorquer que KD n'avait pas eu besoin d'autant de temps pour se fondre dans le collectif des Warriors lors de son arrivée controversée en 2016. Quelle différence ? Il a rejoint un collectif qui venait de signer la meilleure saison régulière de l'histoire, et a remplacé poste pour poste Harrison Barnes. L'équipe n'a pas été modifiée pour lui, ce qui n'est pas le cas ici.
Mais c'est surtout défensivement que le bât blesse. On ne parlera pas du problème Nikola Jokic, qui est de toute façon insoluble pour la quasi-totalité des équipes NBA. Mais comme le dit le dicton : "l'attaque fait lever les foules, la défense gagne des titres". Et sur ce point-là, c'est une déroute qui fait regretter le départ de Mikal Bridges.
En effet, les Suns ont encaissé au moins 110 points lors de cinq de leurs six matchs face aux Nuggets, alors qu'eux même n'ont dépassé ce total que deux fois. Pour deux victoires. La défense des Nuggets a montré ce qui les séparait d'une qualification. Le starting five de Denver a évolué ensemble toute la saison, travaillé sa complémentarité, ses points de détail. Avec deux défenseurs réputés - KCP et Gordon - mais surtout une belle symbiose dans ce secteur. Tout ce qu'il aurait fallu aux Suns.
Ainsi, les Suns sont devenus bien trop dépendants de la réussite au tir de leur duo de feu. Et si Booker a sorti des playoffs de très très très grande qualité, il a perdu son mojo au pire moment - au game 6 - et la franchise n'avait plus de plan B. D'autant que KD a été bon, mais a laissé la lumière à son jeune coéquipier, et a lui aussi failli pour le dernier match, au moment où sa franchise avait le plus besoin de lui. Là encore, le manque de compétition s'est fait sentir.
La fin de CP3 ?
En cas d'échec, il faut des coupables. Visiblement, la franchise vient d'en désigner deux. Si Monty Williams n'est pas sur la sellette - virer le coach à ce moment-là serait dramatique pour la costruction de l'équipe - Tim McMahon d'ESPN nous a appris cet après-midi que la franchise allait faire le nécessaire pour envoyer ailleurs Chris Paul et DeAndre Ayton. Pas une surprise, mais cela pose question.
La franchise a fait de gros efforts pour aller chercher CP3, et d'autres pour le prolonger, malgré son âge et son côté injury prone. Dès sa première saison, il a joué un grand rôle dans le parcours vers les finales NBA, mais n'a pas su mettre le couvercle et aller chercher le titre qu'il voulait tant. Et l'an dernier, il a sombré comme son équipe lors d'un fameux game 7 face aux Mavs.
Encore blessé, il n'a joué que les deux premiers matchs contre les Nuggets. Il a 37 ans et deux ans de contrat à 30 M partiellement garantis. Mais sans se mouiller, les Suns seront perdants dans un échange. S'ils parviennent à monter un trade, ce qui n'est pas garanti. D'autant qu'ils n'ont aucun tour de draft pour séduire des acheteurs, puisqu'ils sont tous dans la banque de Brooklyn. Ici, on n'y croit nullement.
Pour DeAndre Ayton, la donne est différente. Le pivot est jeune, on a déjà vu son potentiel. Mais si ses stats en playoffs sont honorables dans un rôle de troisième option (17.4 pts et 10 rbds), le passif est déjà lourd. Les Suns l'avaient resigné contraints et forcés l'été dernier, matchant une offre des Pacers pour ne pas le perdre contre rien.
Alors oui, ils récupèreront quelque chose. Mais le choix d'Ayton renvoie inévitablement à la draft 2018, où le pivot avait été choisi devant Luka Doncic, entre autres. Et les efforts pour tanker en vue du first pick, la prolongation de l'été dernier, tout cela va être réduit à néant.
Si Ayton part et que CP3 reste, peut-être est-ce une régression qui attend les Suns. Soit l'inverse de l'effet espéré par le trade de KD, que tout le monde voyait comme le transfert de la décennie. Il fallait faire mieux que la finale de 2021 sans lui, et c'est raté. Que cela serve de leçon à tous les GM de NBA : on ne remodèle pas une équipe en trois mois.