Championne du monde en titre mais inexistante en Euroligue : l'Allemagne face à son paradoxe
Tony Parker avait fait de Gordon Herbert son choix numéro 1 pour remplacer son frère TJ à la tête de l'ASVEL. Las, le Hall of Famer ne pourra pas inaugurer la LDLC Arena contre le Bayern avec l'actuel sélectionneur de l'Allemagne couronnée championne du monde en septembre dernier. À quelques mois des Jeux olympiques, la fédération a totalement refusé que le pilier du succès de la Mannschaft puisse porter une double casquette.
Le titre de l'Allemagne en Asie du Sud-Est était aussi prévisible que l'élimination prématurée des Bleus. Emmené par Dennis Schröder, immense en finale contre la Serbie avec 28 points, la Mannschaft s'est affirmée au meilleur moment sur la scène internationale.
Des coaches espagnols, peu de joueurs du cru
En revanche, l'Allemagne est beaucoup plus en retrait en Euroligue. La Bundesliga bénéficie de deux places dans la compétition occupées par le Bayern et l'ALBA. Après 7 journées, le bilan n'est pas fameux : les Bavarois sont 16es, les Berlinois 17es.
En ce qui concerne le Bayern, la volonté de monter en gamme s'est traduite par le recrutement d'un ponte sur le banc : Pablo Laso. Le Basque faisait quasiment partie des meubles puisqu'il était sur le banc du Real Madrid entre 2011 et 2022, avant qu'un accident cardiaque en pendant les playoffs de Liga ne contribue à l'écarter. Avoir un double vainqueur d'Euroligue (2015 et 2018) dans ses rangs n'y change pas grand-chose pour le moment, tout comme avoir signé un big man dans la raquette, également Espagnol. Serge Ibaka est de retour en Europe, à 34 ans.
Pour le moment, l'intégration du champion NBA 2019 avec les Raptors suit son cours et il n'a jamais signé un match en dessous de 10 d'évaluation. Régulier (10.5 points, 6.5 rebonds, 1.3 passe, 1.5 contre, 13.2 d'évaluation en moyenne), assurément le meilleur joueur du Bayern, Ibaka paraît un peu seul malgré le Français Sylvain Francisco, Leandro Bolmaro, Vladimir Lucic, Devin Booker et Isaac Bonga, l'Allemand le plus influent de l'équipe. Avec seulement 2 victoires au compteur, le Bayern est sur les mêmes bases que la saison dernière, achevée au 15e rang avec 11 succès.
La situation est encore plus délicate pour l'ALBA. Avec une seule victoire en 7 journées, la saison est déjà ensablée et le principal objectif de l'équipe berlinoise sera de ne pas terminer à la 18e place. Comme le Bayern, la saison 2022-2023 s'est achevée sur un ratio de 11-23 guère enviable.
Dirigée par l'Espagnol Israel González qui est au club depuis 2017, l'ALBA dispose de davantage de joueurs locaux mais, hormis Johannes Thiemann, il s'agit de joueurs de rotation dans le meilleur des cas, voire carrément des joueurs du bout du banc.
Nowitzki a aboli les frontières
Dans une compétition toujours plus compétitive et attractive financièrement, les clubs allemands sont encore à la traîne au moment de bâtir des effectifs à l'accent national. C'est en partie la "faute" de Dirk Nowitzki, MVP 2007 et champion en 2011 avec les Mavs, qui a emmené dans son sillage une génération qui rêve de NBA et d'y réussir.
Schröder, MVP du Mondial, est dans la ligue depuis 10 ans. Franz Wagner, passé par l'ALBA avant de partir à l'université du Michigan et d'être 8e de la draft 2021, a fait partie du 5 des rookies en 2022 sous le maillot d'Orlando où il évolue avec son frère aîné Moritz, drafté par les Lakers il y a 5 ans. Sans être drafté, Daniel Theis a connu les NBA Finals avec Boston l'an dernier
Cela renforce la sélection mais les clubs locaux en pâtissent. Par ailleurs, les salaires sont plus intéressants dans d'autres écuries d'Euroligue. Maodo Lô, passé par le Bayern (2018-2020) puis l'ALBA (2020-2023) a quitté la Bundesliga à l'intersaison pour rejoindre Johannes Voigtmann à l'Olimpia Milan. Ainsi, dans le roster champion du monde, seuls Andreas Obst, Thiemann, Bonga et Niels Giffey disputent l'Euroligue avec un club allemand.
Avec quelques grands noms mais, jusqu'à présent, sans direction claire, le Bayern et l'ALBA restent dans les profondeurs de l'Euroligue et ne sont pas encore prêts à lutter pour une place dans le Top 8. Une question de temps ou une situation amenée à perdurer ?