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Saint-Gervais, théâtre du grand numéro de Romain Bardet en route vers le podium en 2016

Sébastien Gente
Romain Bardet a connu son premier grand jour en 2016.
Romain Bardet a connu son premier grand jour en 2016.AFP
C'est en 2016 que Romain Bardet a acquis sa réputation de coureur de Grand Tour, lors de la dernière arrivée à Saint-Gervais en date. Une splendide victoire qui lui avait permis de prendre place sur le podium pour la première fois, en plus de sauver l'honneur tricolore.

Jusqu'en 2016, Romain Bardet était un espoir. Prometteur certes, comme il l'avait prouvé avec une 6e place au Tour de France en 2014, mais un espoir. Combien d'espoirs sont éternels ? Combien n'ont jamais confirmé par une vraie grande performance à haut niveau ?

En 2016, l'Auvergnat a 25 ans, et à quelques encablures de l'arrivée, il semblait parti pour une nouvelle place d'honneur. Mais l'étape du Mont-Blanc, mémorable à plusieurs niveaux, lui a permis de renverser la vapeur et de devenir l'un des (le ?) meilleurs coureurs de Grands Tours français du XXIe siècle.

Car nous sommes le vendredi 22 juillet, avant-veille de l'arrivée finale. La  jeudi, Bardet a limité les dégâts sur le contre-la-montre mais, 5e, il est encore court d'une quarantaine de secondes pour le podium. Il reste deux énormes étapes alpestres pour renverser la décision. Mais déjà, un dilemme se profile. 

Beau programme ce jour-là.
Beau programme ce jour-là.Tour de France

Dix de chute

Que faire ? Sur quelle étape attaquer ? La première, au risque de payer l'addition le lendemain, ou la deuxième, ce qui gâcherait une possible cartouche ? Les coureurs font la course parait-il, et ce sont les évènements de la journée qui vont lui permettre de prendre une décision. Car l'élément perturbateur, ce sera une somme de petites choses. 

Les Astana prennent les choses en main dans le peloton, pour mettre dans les meilleures dispositions Fabio Aru, qui voulait l'étape. Un rythme d'enfer derrière une échappée d'une vingtaine, qui provoque la défaillance d'Adam Yates, alors 3e du général, qui va faire l'accordéon toute la journée avant de craquer. Un de moins.

Mais ce qui va réellement rendre cette étape mythique, c'est la pluie qui va s'abattre. Dans la descente de Domancy, c'est un véritable concours de bowling. Des chutes, des chutes, encore des chutes - dont celle de Pierre Rolland, alors en tête, la plupart sans gravité, mais celle qui va tout précipiter, c'est celle du maillot jaune, Christopher Froome. Pas de quoi le faire abandonner, mais il est touché et va devoir faire un effort.

Ça va Bardet ! 

Pour Bardet, il n'y a alors plus à hésiter. Il prend son coéquipier Mikaël Chérel sous le bras, et attaque en bas de la descente. Son ami fait un relais merveilleux, donne tout ce qu'il a, et lance dans les meilleures conditions son leader dans la montée finale. Devant lui, un certain Rui Costa, dernier rescapé de l'échappée. Bardet le rattrape, le Portugais va lui sucer la roue un bon moment, mais le Tricolore a appris la patience. 

Quand il a récupéré de son effort initial, il lâche le Portugais, et fonce vers une sublime victoire. La question est alors la suivante : le podium est-il possible ? Nairo Quintana est là, mais Bauka Mollema, 2e du général le matin, craque totalement et laisse la place vacante. Au final, le gain est minime mais suffisant. Bardet double Quintana et prend la seconde place.

Mais galvanisée par la performance, la France du vélo se prend à rêver. L'Auvergnat a plus de 4 minutes de retard sur Froome, mais il reste une étape de montagne, et pas n'importe laquelle. La Colombière, La Ramaz et Joux-Plane. Un tryptique exceptionnel, sur le papier, capable de bouleverser n'importe quel classement général.

Sauf qu'en plus de la patience, Romain Bardet a appris la raison. Un grand numéro deux jours de suite, ce n'est sans doute pas dans ses cordes. Pas de raison de prendre le risque, une deuxième place au Tour de France à 25 ans, c'est un immense accomplissement. La raison l'emporte, et il terminera avec les favoris.

Ainsi, à lui seul, l'Auvergnat vient de sauver la Grande Boucle des Bleus. C'est lui qui est allé chercher le seul succès d'étape tricolore. C'est lui qui monte le podium, et qui sera le seul Bleu dans le Top 15. Contrairement à son ex-leader Jean-Christophe Péraud, 2e en 2014 à 37 ans, il représente l'avenir. Entre lui et Thibaut Pinot, la France va bien en claquer une, pense-t-on alors.

Eh bien non, Bernard Hinault attend toujours son successeur, 38 ans plus tard. Parfois par malchance, parfois par manque de préparation, désormais par la faute d'un niveau décroissant, Romain Bardet n'a pas gagné et ne gagnera pas le Tour. Reste le souvenir de ces grandes performances, celles du Français le plus constant sur la Grande Boucle au XXIe siècle mais qui ne pourra répéter son épopée, la faute à une vilaine chute samedi sur la route de Morzine. 

France gouvernement

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