Tour de France 2024 : la quête de Pogacar, le mystère Vingegaard
Un premier grand départ d'Italie, nation historique du cyclisme. Et une arrivée tout aussi inédite hors de Paris, Jeux olympiques oblige, sur un ultime contre-la-montre le dimanche 21 juillet entre Monaco et Nice : c'est une Grande Boucle sans nulle autre pareille qui prend son envol samedi à Florence, dans le berceau de la Renaissance.
Et elle s'annonce terriblement excitante… Les six grandes stars du cyclisme mondial - Tadej Pogacar, Jonas Vingegaard, Remco Evenepoel et Primoz Roglic pour le classement général, ainsi que Mathieu van der Poel et Wout van Aert qui viseront surtout des étapes - seront présentes pour la toute première fois en même temps sur la même course, ce qui n'était pas gagné au vu des nombreuses chutes qui ont décimé le peloton au printemps.
Au final, il ne manquera guère que Julian Alaphilippe, le chouchou du public français déjà orphelin du retraité Thibaut Pinot, et un candidat national crédible à un podium pour que la fête soit complète.
Les points d'intérêt sont nombreux. Quel niveau pourra atteindre Remco Evenepoel pour son premier Tour de France, lui le phénomène qui apparaît parfois encore juste en haute montagne ?
Défi titanesque
Primoz Roglic, émancipé de la tutelle de Vingegaard en rejoignant l'équipe Bora, peut-il postuler à la victoire finale, quatre ans après avoir été dépossédé du maillot jaune par Pogacar dans l'ultime chrono?
Jonas Vingegaard peut-il briguer un troisième sacre consécutif, ce qui serait sans doute son plus grand exploit après trois mois sans courir suite à son accident au Tour du Pays basque ?
Mais la question que tout le monde se pose d'abord est de savoir si Tadej Pogacar peut devenir le premier coureur depuis Marco Pantani en 1998 à remporter la même année Tour d'Italie et Tour de France.
Ce défi titanesque n'a été mené à bout que par sept hommes dans toute l'histoire du cyclisme, tous des géants du siècle dernier (Coppi, Anquetil, Merckx, Hinault, Roche, Indurain, Pantani). En survolant le Giro avec près de dix minutes d'avance, le Slovène a bouclé la première partie de ses grands travaux.
Sur le Tour, après ses deux victoires en 2020 et 2021, il a buté ces deux dernières années sur Vingegaard, qui s'est montré supérieur dans les cols. Mais, cette année, la balance penche dans l'autre sens. Parce que Vingegaard aura du mal à être vraiment à 100 % après son grave accident début avril (multiples fractures aux côtes et à la clavicule, pneumothorax).
Et parce que Pogacar, qui en 2023 revenait lui aussi de blessure, n'a jamais paru aussi fort, affûté comme une lame et mieux posé sur son vélo de chrono, un élément important vu qu'il y aura deux contre-la-monte au menu.
En haute altitude
Le rapport de force semble aussi s'être inversé au niveau des équipes. Celle de Vingegaard, Visma-Lease a bike, si dominante l'an dernier au point de remporter les trois grands Tours, est poursuivie par une scoumoune incroyable depuis le début de saison, quand Pogacar est à la tête d'une "Dream Team" chez UAE (Yates, Ayuso, Almeida…).
La principale incertitude vient, outre la capacité de Pogacar à encaisser deux grands Tours de suite, dans l'adaptation du Slovène à la haute altitude, son point faible, surtout lorsqu'il fait chaud.
Or, on montera très haut cette année, notamment lors de la terrible 19ᵉ étape où le peloton escaladera successivement le col de Vars (2 109 m), la cime de la Bonnette, toit du Tour (2 802 m !), avant d'arriver à Isola 2000. Conséquence du départ d'Italie, le Galibier (2 642 m) sera à franchir dès le quatrième jour et le Tourmalet (2 115 m) sera également au programme dans les Pyrénées.
Pour le reste, les deux premières étapes promettent déjà d'être explosives : plus gros dénivelé de l'histoire pour un premier jour samedi (3 700 m), double-ascension de la côte de San Luca dimanche. Passé le Galibier, il y aura un chrono "grand cru" très attendu dans les vignobles entre Nuits-Saint-Georges et Gevrey-Chambertin, une étape qui promet dans le Massif Central vers le Lioran et la traversée des Pyrénées.
Avant un final dans les Alpes et un ultime chrono exigeant dimanche 21 juillet, dans un décor de carte postale entre Monaco et Nice. Trente-cinq ans après le duel immortel entre Laurent Fignon et Greg Lemond sur les Champs-Élysées, les organisateurs rêvent d'un dénouement tout aussi palpitant.