Et dire que le Guinéen Morgan Guilavogui voulait arrêter le foot...
"Il a joué petit chez nous à Toulon, il est parti à Saint-Étienne en centre de formation, mais il n'a pas gagné sa place. Il était découragé, il voulait arrêter le foot", raconte à l'AFP le président du club varois Claude Joye.
"Il est revenu modestement au Sporting dans les équipes réserves, milieu défensif comme son frère Josuha (international français, NDLR), puis l'entraîneur des U19 l'a replacé avant-centre et il a explosé, marquant une quarantaine de buts", poursuit le dirigeant. "C'est un joueur qui a une trajectoire atypique. Beaucoup de joueurs commencent attaquant et finissent défenseur, très peu font le chemin inverse", rigole Youssef Sif, le technicien qui a eu cette idée de génie.
"Il voulait jouer comme son frère, son modèle, mais on a rapidement identifié ses qualités: prise de balle, passe et sens du but", poursuit le formateur.
"Reconnaissance du berceau"
"Athlétiquement, il était à la rue complet", se souvient Sif, "cela faisait un an qu'il ne jouait pas, une saison blanche après Saint-Étienne, entre 2014 et 2015. Puis il a voulu reprendre le foot uniquement pour retrouver ses amis, il avait mis de côté l'idée d'être pro".
La machine est lancée, Guilavogui finit en équipe première et contribue à la montée en N1 en 2020. "Il a la reconnaissance du berceau: on l'a relancé, et lui nous a fait monter en National 1", reprend Joye. "C'est un gamin de Toulon, Morgan est toujours resté proche du club".
Guilavogui passe pro au Paris FC, et trois ans plus tard rejoint le RC Lens, où il a découvert la C1.
"Quand il a signé à Lens, il est revenu au club et il a invité au restau tous les joueurs avec qui il a joué. Il est venu me remercier, il a remercié mon épouse, c'est une bonne personne", estime Joye.
"C'est un super garçon, resté très proche de tous les gens qui ont pu l'accompagner dans son parcours", appuie Sif. "À chaque fois qu'il franchit une étape dans son parcours, il m'appelle pour me remercier. Ce qui lui arrive, il le mérite".
Au-delà de ses qualités humaines, Guilavogui est aussi un très bon footballeur.
"Dernière passe magique"
"En face-à-face avec le gardien, il a une décontraction incroyable, juge Sif. On le voit à son langage corporel, il est à l'aise face au but, dans son meilleur élément".
"Sa dernière passe est magique, avec son pied droit il fait des centres qui font penser à un gaucher", complète Didier Six, le premier à le convoquer avec le "Syli National" le 12 novembre 2021, contre la Guinée-Bissau (0-0).
C'est Kaba Diawara, enfant de Toulon aussi, alors adjoint de Six avant de prendre sa place juste avant la CAN de 2022, qui avait mené les démarches.
"Morgan à la triple nationalité, française, guinéenne et marocaine", explique Sif. "Il était aussi en réflexion pour le Maroc, il a choisi le pays de son père plutôt que de sa mère".
Porter le maillot de la Guinée, "c'est une très grande fierté, je suis le plus heureux", dit Morgan Guilavogui, désormais à 19 sélections (2 buts).
"J'ai commencé en novembre 2021, j'ai eu très peu de matches avec la Guinée avant ma première CAN (deux, NDLR). Maintenant, j'ai un peu plus d'expérience et j'arrive à bien m'exprimer".
Il a aussi "une revanche à prendre" sur 2022. "C'était ma première CAN, je n'étais pas encore prêt, j'ai eu beaucoup de problèmes de Covid, j'ai joué un seul match de poule", se souvient-il. "Maintenant je suis prêt".