Les carences des trains allemands feront-elles dérailler l'Euro 2024 ?
Avec leurs infrastructures vieillissantes, leurs retards et grèves en série, les chemins de fer allemands ne sont pas au mieux de leur forme pour accueillir le flot de supporters que va drainer la compétition du 14 juin au 14 juillet.
Autrefois considéré comme un symbole de l'efficacité et de la ponctualité allemandes, le réseau ferroviaire du pays est désormais synonyme de trains annulés, de correspondances loupées, de wagons-restaurants ou de toilettes fermés.
L'année dernière, 36 % des trains longue distance ont subi des retards d'au moins six minutes – souvent beaucoup plus –, l'opérateur public Deutsche Bahn (DB) imputant cette situation au mauvais état des chemins de fer qui nécessitent de fréquents travaux.
"Supporters écossais, faites attention : assurez-vous de prendre le train qui part le plus tôt !", lance à ses adhérents Paul Goodwin, co-fondateur de la Scottish Football Supporters Association.
"Restez au pub moins longtemps. Prévoyez de la marge… La dernière chose que vous voulez, c'est d'arriver à la mi-temps", conseille-t-il dans un entretien à l'AFP.
Jusqu'à 40 000 supporters écossais vont faire le déplacement pour la compétition, estime-t-il notamment pour le match d'ouverture, Écosse - Allemagne le 14 juin à Munich.
Des fans "pas faciles à gérer"
La Deutsche Bahn insiste sur le fait qu'elle est prête à accueillir des dizaines de milliers de passagers en provenance de toute l'Europe.
Elle fournira 10 000 places supplémentaires les jours de match, propose des tarifs réduits aux détenteurs de billets et a même déployé un train aux couleurs de l'Euro 2024.
De leur côté, les organisateurs ont cherché à faciliter la vie des visiteurs. Pendant les phases de groupes, chaque équipe jouera dans l'une des trois zones géographiques définies – sud, nord ou ouest de l'Allemagne –, ce qui signifie moins de déplacements pour les supporters et les sélections. Malgré la communication rassurante de Deutsche Bahn, les déboires du rail allemand font régulièrement la Une de la presse.
L'opérateur allemand est engagé dans un chantier titanesque pour moderniser sa flotte et son réseau. Au moins 30 milliards d'euros doivent être investis d'ici 2027. Les plus gros travaux ne démarreront qu'une fois l'Euro terminé, afin de réduire les perturbations.
Mais la DB reconnaît "ne pouvoir se passer totalement de travaux, car il y a urgence à rattraper le retard accumulé au cours des dernières années".
L'association allemande des voyageurs ferroviaires Pro-Bahn avertit que même de petits retards "risquent de se propager à l'ensemble du réseau et d'entraîner des perturbations", selon son responsable Karl-Peter Naumann.
"Ensuite, la question est de savoir comment se comportent les fans. Parfois, lorsqu'ils ont bu beaucoup de bière, ils ne sont pas faciles à gérer", dit-il à l'AFP.
"Un peu de patience"
Les inquiétudes concernant la sécurité du personnel ont conduit le syndicat EVG – qui représente environ 180 000 cheminots et a paralysé le réseau avec une série de grèves l'année dernière –, à menacer d'un arrêt de travail pendant l'Euro si la sécurité n'était pas améliorée.
"Nous veillerons à ce que les trains ne circulent pas", a déclaré Kristian Loroch, membre du conseil d'administration d'EVG, au journal Tagesspiegel au début du mois.
Une enquête menée auprès du personnel d'EVG a révélé qu'environ 64 % des 4 000 personnes interrogées déclaraient avoir subi une agression physique ou verbale au cours des 12 derniers mois. La Deutsche Bahn a affirmé qu'elle renforcerait les effectifs de son personnel de sécurité pendant la compétition.
Philipp Lahm, patron de l'organisation, se veut optimiste, voyant dans l'Euro 2024 "une bonne opportunité de montrer que (...) les infrastructures fonctionnent en Allemagne".
Mais il a aussi adressé un message aux supporters : "Un peu de patience ne fera pas de mal, a-t-il dit à l'AFP. Tout ne sera pas parfait."