Pourtant, les championnats ne sont pas au repos partout… Et les derbys non plus ! En Europe, les championnats inférieures sont disputées pendant les matches de qualification des équipes nationales. En Espagne, en deuxième division, un derby est à l'ordre du jour, l'un des plus historiques du football espagnol. Et il n'a rien à voir avec le Clásico ou avec le derby de Séville.
Les Asturies, une région engagée et un derby plein d'ardeur
Les Asturies, l'une des 17 communautés autonomes d'Espagne – situé au nord, dans le golfe de Gascogne –, ont un caractère spécifique par rapport au reste du pays. Officiellement, il s'agit d'une principauté (le roi d'Espagne occupe toujours le poste de "prince des Asturies"). Cependant, la plus grande rareté de la région est sa langue. L'officielle est bien sûr l'espagnol, mais l'asturien est encore très répandu. Elle est parlée par environ un cinquième de la population de la région et est également enseignée dans les écoles.
Les Asturies sont "éloignées" non seulement géographiquement, mais aussi économiquement. C'est l'une des régions les plus pauvres d'Espagne.
Cela est dû à sa situation géographique et au fait que l'économie asturienne repose principalement sur une industrie lourde. Or, depuis les années 1960, elle est en récession. Parmi les activités économiques traditionnelles de la région, seule l'agriculture de montagne (en particulier l'élevage de vaches) a partiellement survécu et continue de prospérer grâce au paysage montagneux.
Le port de Gijón joue un rôle important dans l'économie locale. Le tourisme, bien que les Asturies soient belles et offrent de nombreux sites historiques (le plus important étant la ville historique d'Oviedo), ne se développe que trop lentement.
C'est entre Gijón, la plus grande ville de la région, et Oviedo, la capitale de la Principauté des Asturies, que des tensions existent, en raison de la nature très différente des deux villes et de leurs habitants. Les différends entre les deux entités existent depuis le Moyen Âge jusqu'à l'histoire récente. Après la chute du régime dictatorial de Franco et le rétablissement de la démocratie, les Asturies ont obtenu une large autonomie en tant que province d'Oviedo en 1978. Naturellement, le nouveau nom officiel de la région a posé problème à Gijón. C'est pourquoi depuis 1982, la province s'appelle Asturies.
La rivalité entre les deux villes se reflète également dans le football. Le football est une grande passion en Espagne et les Asturiens ne sont pas différents à leur société. Au contraire, le football semble jouer un rôle encore plus fondamental dans la vie des communautés locales.
Tout comme le cidre est lié à la culture asturienne, le derby asturien fait également partie des couleurs locales. Il s'agit d'un choc entre les deux plus grands clubs de deux des plus grandes villes asturiennes rivales : le Real Oviedo et le Sporting Gijón.
Le plus important, c'est la victoire !
Il a déjà été mentionné qu'Oviedo et Gijón sont très différents l'un de l'autre, ce qui explique pourquoi il existe (entre autres) une rivalité footballistique entre les deux villes.
Oviedo est la capitale des Asturies. Outre ses nombreux édifices culturels, tels que des théâtres, des opéras et des galeries, elle possède un site classé au patrimoine mondial de l'UNESCO, la chapelle préromane de la Cámara Santa, datant du IXe siècle.
Aussi, les habitants de la capitale, par rapport à ceux de Gijón, se sentent tout simplement plus "huppés". Leurs rivaux de la ville portuaire les considèrent également comme plus "chics".
Gijón, elle, est la plus grande ville des Asturies. Elle compte 270 000 habitants (50 000 de plus qu'Oviedo). Une grande partie de ses habitants travaillent dans le port ou dans les industries. Leur club, le Sporting, se présente comme le club des travailleurs de Gijón.
La rivalité entre le Real Oviedo et le Sporting de Gijón repose en réalité sur les différences entre les deux villes et leurs habitants. Sur le plan sportif, aucun des deux clubs n'a connu de grands succès, même historiques. Ni le Real Oviedo, ni le Sporting de Gijón n'ont de trophées espagnols majeurs à leur palmarès.
De plus, les deux clubs, qui sont des clubs historiques, n'arrivent pas à s'imposer en première division. Aucun d'entre eux n'est un habitué des compétitions de haut niveau, en tout cas pas récemment. Le Real Oviedo et le Sporting de Gijón ont tous deux plus d'un siècle de tradition et se sont rencontrés pour la première fois en 1926.
Le championnat espagnol, lui, a été créé en 1929. 155 derbies asturiens ont été disputés. C'est pourquoi il est si important pour les deux camps. Pour Oviedo comme pour Gijón, une victoire sur un rival voisin est souvent plus importante que les résultats obtenus dans le reste de la compétition.
Les Asturies, un vivier de talent
Bien que ni le Real Oviedo ni le Sporting de Gijón ne débordent de succès, le football local est réputé pour produire de grands footballeurs.
Le Real Oviedo a notamment formé des joueurs offensifs tels que Michu (qui a notamment brillé en Premier League sous le maillot de Swansea City), Juan Mata (Chelsea, Manchester United, aujourd'hui Galatasaray) et Santi Cazorla (Arsenal, Villarreal). Michu a terminé sa carrière au Real Oviedo lors de la saison 2016-2017. Santi Cazorla a fait de même à l'été 2023, revenant aider le club qui l'a formé après son passage à Al-Sadd.
Le produit le plus célèbre de la fameuse académie du Sporting de Gijón (appelée Escuela de Fútbol de Mareo) est l'un des plus grands attaquants espagnols de l'histoire du football : David Villa (Valence, Barcelone, Atlético de Madrid et, à la fin de sa carrière, Melbourne City, New York City et Kobe).
Rejoindre les clubs ? Jamais !
Aux alentours de l'an 2000, le Real Oviedo et le Sporting de Gijón connaissent tous deux d'énormes difficultés financières. Des rumeurs ont circulé dans les Asturies selon lesquelles les représentants des deux clubs envisageaient une fusion.
L'idée s'agissait de créer un club appelé le Real Asturias, pour lequel un stade serait éventuellement construit à mi-chemin entre les deux villes. Ce projet de nouveau stade avait pour but de calmer les tensions entre les supporters des deux équipes et de leur faire comprendre qu'ils n'auraient pas à se rendre dans la ville voisine tant détestée pour assister aux matches de leur nouvelle équipe.
Mais cela n'a pas fonctionné. L'idée a suscité une forte opposition dans les deux camps, non seulement de la part des supporters, mais aussi de la part des diverses entreprises et sociétés qui soutiennent l'un ou l'autre club. La fusion n'a pas eu lieu, laissant les deux clubs dans une situation économique sombre.
Mais la situation d'Oviedo est devenu bien pire. Le Real Oviedo, qui, lors de la saison 2000-2001, se battait encore avec les meilleurs, s'est retrouvé trois ans plus tard, lors de la saison 2003-2004, trois niveaux plus bas (à l'été 2003, le club a été relégué de la 2ᵉ à la 4ᵉ division, précisément dû à cause de ses dettes).
Les Asturies sont dominées par le bleu
C'est lors de la saison 2017-2018 que les deux rivaux asturiens se sont retrouvés en Segunda División, après la relégation du Sporting de Gijón en deuxième division.
Le derby asturien est revenu sur le devant de la scène après 14 longues années. L'atmosphère du premier derby de cette nouvelle ère était très tendue. Les rues de Gijón ressemblaient à un champ de bataille. Beaucoup d'échauffourées, de pierres et même de chaises de restaurants volaient dans les airs.
Ce derby s'est soldé par un match nul 1-1. Depuis 2017, le derby asturien a été disputé 12 fois. Au vu des résultats de ces rencontres, Oviedo règne actuellement en maître absolu en Asturies. Los Azules (Les Bleus), comme sont surnommés les footballeurs du Real Oviedo, ont remporté sept derbys, quatre nuls ont été réalisés et une seule fois les Rojiblancos (Rouge et Blanc) du Sporting de Gijón se sont imposés.
Cette année, le Real Oviedo n'a pas bien commencé la saison. Après quatre journées, il ne compte que 2 points et occupe la dernière place du classement. Il sera d'autant plus important donc de se rattraper dans ce derby. Gijón compte 6 points (2 victoires, 2 défaites).
Pendant ce temps, Santi Cazorla, de retour au pays en août dernier, rattrape son retard à l'entraînement. Sera-t-il au moins présent sur le banc et aidera-t-il son équipe à remporter sa première victoire de la saison ? Réponse ce week-end.
