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Des individualités multiples et variées ou comment l'Île-de-France cultive sa particularité

Jean-Raphaël Abomba et ses joueurs.
Jean-Raphaël Abomba et ses joueurs.Sofihane
À l'Euro 2024, l'équipe de France a mis le cap sur l'Allemagne avec 50 % de joueurs formés en région parisienne. Un contingent important qui révèle année après année à quel point l'Ile-de-France est devenu un terreau plus que fertile. Flashscore France est donc parti à la rencontre d'un éducateur qui officie à Joinville-le-Pont dans le Val-de-Marne.

À 28 ans, il a déjà dix ans d'expérience derrière lui tout en ayant pu apprendre dans des structures professionnelles ainsi qu'à l'étranger, Jean Raphaël Abomba entraîne une équipe de jeunes dans l'est parisien. Son témoignage permet alors de comprendre un peu mieux les rouages de la formation francilienne. 

"Joinville m'a laissé gérer la catégorie U17-18 à ma manière, en me laissant cette liberté, cette possibilité de mettre des choses en place. Tout ça est positif. C'est une chance, car j'ai pu allier projet de jeu, développement du joueur et de la personne. Et, en plus, j'ai eu des résultats. On a pu montrer sur ces trois ans qu'en ayant un projet de jeu, en étant cohérent, en ayant une identité de jeu, des valeurs, des principes, on peut avoir des résultats", explique-t-il.

Malgré sa jeunesse, il est déjà convaincu et tente d'indiquer pourquoi l'Île-de-France a le vent en poupe ces dernières années. Pourtant, il ne faut pas oublier que certains internationaux français ont été formés dans des clubs amateurs, voire semi-professionnels au mieux, n'ayant donc que peu de moyens à disposition. 

"Les moyens des clubs sont limités, la majorité d'entre eux dépend des municipalités. C'est-à-dire qu'ils ne peuvent pas faire n'importe quoi sur le plan économique."

Jean Raphaël Abomba avec l'un de ses joueurs.
Jean Raphaël Abomba avec l'un de ses joueurs.Sofihane

Et, malgré ce bon air ambiant, Jean Raphaël Abomba abonde immédiatement vers une certaine direction, avec l'idée de ne pas rester sur ses acquis. Détenteur de la licence UEFA B et responsable et initiateur de l’académie de séance spécifique appelé "Itinéraire d’un champion", l'homme de 28 ans est animé par une approche moderne.

"Je ne veux plus être dans une vision craintive du football, comme beaucoup d'entraîneurs. Il y a des manières de gérer un match, on peut fermer la boîte, on peut garder le ballon, on peut encore plus attaquer, on peut mettre du rythme. Quand on est craintif et hésitant, malheureusement, on peut ne pas obtenir de résultat. Après, ça ne veut pas forcément dire que tu vas gagner. Tu peux gagner les matchs différemment, en fonction du contexte et c'est ça qui m'a conforté dans l'idée qu'il faut garder son identité."

Les meilleures individualités du pays…

"Je pense que les coachs se basent beaucoup sur la qualité de leurs joueurs et ne se basent plus trop sur la manière de développer les joueurs et comment les faire progresser", indique Abomba sur ce qu'il se passe en région parisienne. Cela peut paraître paradoxal quand on sait que de nombreux jeunes joueurs parviennent à devenir professionnel. Mais, finalement, on comprend que leurs qualités individuelles sont telles qu'elles suffisent pour aller plus haut. En effet, chez les jeunes, les Franciliens sont les meilleurs.

D'ailleurs, le recrutement fait davantage que la force des collectifs, malgré ce que lui a envie de mettre en place à Joinville. "La réussite d'une saison en Ile-de-France se joue à 80 % dans le recrutement. Si le recrutement est bon, la saison est réussie à 80 % en Ile-de-France. Malgré tout, c'est l'alliance entre les bons joueurs que tu peux avoir à ta disposition et le projet de jeu qui te ramènent des résultats et qui permet ensuite de les pérenniser."

Cela n'empêche qu'il faille éviter de globaliser certains constats et Jean Raphaël Abomba n'est, selon lui, pas le seul à ne pas se suffire du potentiel de ses jeunes.

"Le coach de Versailles réfléchi comme ça. Il y a certains coachs qui ont cette approche entre un projet de jeu élaboré et un développement individuel. Mais, je pense que tant qu'on aura les meilleurs joueurs (en Ile-de-France) qui permettent de gagner des matches, les gens ne se remetteront pas en question."

Les U18 du RC Joinville.
Les U18 du RC Joinville.Sofihane

Et, justement, il est vital de comprendre que l'Île-de-France semble être une région unique. Les profils des jeunes sont multiples et peuvent donc s'exporter plus facilement aux quatre coins de la France, voire à l'étranger ces dernières années. En effet, la Bundesliga n'a pas hésité à se pencher sur les centres de formations hexagonaux. Mais, pour Jean Raphaël Abomba, cette variété doit être une force qui doit pousser à faire encore mieux.

"En Île-de-France, on a des joueurs athlétiques, des joueurs techniques, des joueurs intelligents, on a des profils différents. Pourquoi alors se réduire à un football de position, alors qu'on peut également avoir de la transition ? Mais on n'est pas dans un état d'esprit qui tend à réfléchir. Les entraîneurs s'adaptent vraiment par rapport à leurs joueurs et ne gagnent pas forcément parce qu'ils travaillent mieux."

... qui ne permettent pas la remise en question !

"Parce que tout le monde a des niveaux régionaux, en centre de formation, il y a beaucoup plus d'ouverture pour signer dans un club pro, bien que l'on vire beaucoup plus de joueurs aussi. Donc, l'accès au football de haut niveau est plus facile. Mais, que font les clubs pour pérenniser le travail effectué, car la priorité est de pérenniser les choses. Et je pense que les gens vont se réveiller quand le niveau sera homogène. Si les clubs de la région continuent d'avoir les meilleurs joueurs, ils ne se remettront pas en question", constate Abomba.

Un avis qui tranche avec ce qu'on peut lire ici et là ces derniers temps, mais qui semble loin d'être dénué de vérité. C'est humain, lorsque l'on rencontre le succès, il est moins évident de se réfléchir aux axes d'amélioration. Dans le sport, c'est souvent l'échec qui permet de changer son fusil d'épaule. Et, cela peut se voir également au sein de l'équipe de France, qui peine à se réinventer – en témoigne l'Euro 2024.

"L'Île-de-France a besoin de concurrence. Il y a de bons joueurs partout en France, mais la multitude des profils disponibles n'est pas généralisé. Par exemple, dans la région lyonnaise, ainsi que dans la région nordiste, les profils se ressemblent à peu près tous. Alors qu'en Île-de-France, ne serait-ce que dans mon équipe, je peux aligner trois types de milieux de terrain. Mais ça peut changer à terme avec de nouvelles régions qui progressent grâce aux migrations d'ici cinq ans."

Selon Jean Raphaël Abomba, l'Île-de-France risque de devoir attendre de voir que d'autres régions rattrapent leurs retards pour se remettre à travailler en profondeur.

"Quand les équipes de provinces, notamment chez les nationaux, jouent contre des équipes parisiennes et qu'elles sont en dessous, elles doivent trouver des solutions, elles se mettent à travailler. Et je pense que les équipes dans les autres régions travaillent par défaut", abonde le technicien de 28 ans.

Mais l'espoir est là

Car, peu importe finalement le projet de jeu de chaque entraîneur, l'idée est de ne pas se reposer sur les individualités impressionnantes des jeunes Franciliens, mais bien de développer les équipes avec l'idée de renforcer la culture régionale : continuer donc de former les profils existants. Pour cela, les acteurs doivent regarder vers le haut avec la volonté de vouloir faire toujours mieux.

"Il faut qu'on apprenne des meilleurs et qu'on parle avec les meilleurs. Et la chance qu'on a, c'est qu'en France, on peut le faire, comme faire des stages et observer des séances dans des structures professionnelles. Cela permettrait de renforcer notre identité, au contraire de vouloir garder sa place à tout prix. Certains coachs pensent qu'en ayant des résultats, ils conserveront leur place ou obtiendront une promotion. Mais déjà, si on pense comme ça, ce n'est pas bon."

L'Île-de-France possède le plus gros réservoir du pays et ces dernières années, nombreux sont les joueurs qui sont parvenus à exploser aux yeux du grand public. Cela a été rendu possible grâce aux éducateurs franciliens qui œuvrent déjà beaucoup, mais pas toujours avec la bonne mentalité. 

"Tant qu'on verra les résultats comme un révélateur, car c'est actuellement ce qu'il se passe en Ile-de-France, on n'avancera pas, mais il existe des coachs qui souhaitent se détacher de ça. Mais, on doit surtout dessiner notre identité à travers nos joueurs longilignes, box-to-box, caractériels, qui mettent beaucoup d'intensité", conclut Jean Raphaël Abomba.

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