De retour en Ligue 1 quatorze ans plus tard, Flashscore France vous plonge dans les coulisses du club doyen du football français, alors que ce dernier retrouve l'élite pour la troisième fois de son histoire au XXIe siècle.
Petit rappel historique, avant de se focaliser sur la saison 2022-2023 historique et sur ce qui attend les hommes de Luka Elsner en Ligue 1.
Une histoire séculaire
Le Havre Athletic Club, c'est une entité omnisports. Fondé en 1884 - le plus vieux encore en activité derrière celui des Girondins de Bordeaux -, le club s'inscrit dans la tendance, puisque c'est à partir de la seconde moitié du XIXe siècle que de tels groupements sportifs se forment. Il convient de rappeler qu'un mythe tenace entoure le club havrais. En effet, la mémoire collective a retenu l'information selon laquelle le HAC aurait été fondé en 1872. Or, cela n'a jamais été avéré, car c'est un autre club omnisports du Havre qui a existé de 1872 à 1882, celui appelé le Football Club havrais.
Quelques années après, le HAC fait partie de ceux qui intègrent l'Union des sociétés françaises de sports athlétiques, l'ancêtre commun à toutes les fédérations sportives. En attendant, la section football du Havre s'ouvre en 1894 – la plus ancienne encore en activité –, et devient triple-champion de France : 1899, 1900 et 1919.
Durant l'entre-deux-guerres, le football entame sa mue vers la professionnalisation et en ce sens, la Fédération française de football voit le jour. En 1932, la première édition de la Division 1 – malgré le fait qu'elle ne porte pas encore cette désignation –, et Le Havre s'y hisse cinq ans plus tard. Footballistiquement, le club normand va vivoter entre les deux premières divisions jusqu'au début des années 1960, avec deux titres au compteur : un titre de D2 en 1959 ainsi qu'une victoire finale en Coupe de France la même année.
La suite est bien plus difficile et c'est pour cette raison qu'il est intéressant de noter que la 3ᵉ place de D1 acquise en 1951 reste encore aujourd'hui la meilleure performance de l'histoire du club.
En effet, le HAC ne retrouve l'élite du football français que lors de la saison 1985-1986, 23 ans après. Toutefois, il est relégué dès 1988 pour faire l'ascenseur trois ans plus tard. Vient alors la période la plus stable. De 1991 à 2000, Le Havre parvient à se maintenir en Division 1. Et, ce n'est pas tout, puisqu'en 1995, l'équipe entraînée par Guy David se hisse en demi-finale de Coupe de la Ligue, à l'occasion de la 1ʳᵉ édition. En Coupe de France, les Havrais vont jusqu'en 1/8ᵉ de finale, stade atteint une seule fois depuis (en 2012-2013).
Enfin, depuis le début du XXIe siècle, c'est de nouveau plus difficile malgré les longs mandats qui se succèdent à la présidence (Jean-Pierre Hureau de 1979 à 2000, puis Jean-Pierre Louvel de 2000 à 2015). Hormis ce titre de Ligue 2 en 2023, le HAC a disputé que deux saisons en L1 : 2002-2003 et 2008-2009. Avec, à la clé deux dernières places, le club ne performe que très peu. Néanmoins, il faut admettre qu'il obtient le statut de taulier à l'étage d'en dessous. 17 fois dans le top 10 en 21 exercices, c'est plutôt costaud.
Pourtant, ce que l'on retient, ce sont les joueurs qui sont passés par le club, aussi bien à la formation qu'en équipe première : Jean-Alain Boumsong, Pascal Chimbonda, Vikash Dhorasoo, Alou Diarra, Lassana Diarra, Didier Digard, Nicolas Douchez, Guillaume Hoarau, Tino Kadewere (plus grosse vente du club), Carlos Kameni, Riyad Mahrez, Steve Mandanda, Benjamin Mendy, Ferland Mendy, Charles N'Zogbia, Dimitri Payet, Paul Pogba et Florent Sinama-Pongolle.
Quatorze ans plus tard, le retour en Ligue 1
À l'été 2022, beaucoup de changements s'opèrent de la direction au terrain. Un chamboulement plutôt osé est perçu à ce moment-là par les observateurs, d'autant que certaines nouvelles têtes n'ont pas, ou peu, d'expérience au niveau indiqué. Mais pas de quoi avoir peur.
Luka Elsner, ancien coach d'Amiens, arrive au poste d’entraîneur pour remplacer Paul Le Guen. Mathieu Bodmer, lui, devient directeur sportif. Jean-Michel Roussier, passé par l'OM et Nancy, endosse lui le costume de président alors que Mohamed El Kharraze est introduit comme directeur du recrutement et Julien Momont comme analyste du jeu. Alors que Le Havre avait terminé la saison 2021-2022 à la 12ᵉ place de Ligue 2, le propriétaire Vincent Volpe avait justifié ces changements par des "résultats sportifs insuffisants depuis sept ans".
Des décisions qui se sont avérées être payantes. La Ligue 2 est un championnat exigeant dont la montée se joue souvent sur des détails. En effet, si l'on regarde le palmarès de l'anti-chambre de l'élite du football français, on s'aperçoit que peu d'équipes sont parvenus à dominer outrageusement sur une saison. On pense notamment à Reims en 2017-2018, ou Metz la saison suivante. Et, les Havrais auraient pu s'approcher d'une telle saison statistique. Cependant, la fin d'exercice a été plus délicate et plusieurs points ont été lâchés de façon plutôt inattendue. Mais, ça n'altère globalement pas la très belle performance du HAC d'août à juin.
32, c'est le nombre de matches consécutifs sans perdre disputés par l'équipe de Luka Elsner. Une prouesse réalisée par une seule équipe dans l'histoire de la L2 : Sedan en 1954-1955. L'accomplissement représente bien plus qu'un symbole, il démontre que les Normands étaient prêts pour la Ligue 1 depuis de nombreux mois. En effet, de la défaite à la 2ᵉ journée jusqu'à celle de la 35ᵉ, les Havrais n'ont pas connu que des victoires ou, au pire, des matches nuls.
Sans être particulièrement spectaculaires, les protégés du Slovène ont fait preuve d'une solidité sans faille. Tout en contrôle, ils ont rendu leur équipe en véritable forteresse. La domination face à de nombreuses formations de l'Hexagone a été évidente tout au long de la saison. À partir de la 14ᵉ journée, le HAC a pris la tête du classement pour ne plus la quitter. Dès le printemps, les observateurs ont vite compris que les Ciel et Marine étaient partis pour retrouver la L1.
Un autre indice a éveillé les soupçons : l'excellente défense incarnée par la charnière centrale composée d'Arouna Sangante (20 ans) et de Gautier Lloris (26 ans), ainsi que le gardien Arthur Desmas (28 ans), et enfin les deux latéraux Christopher Operi (25 ans), à gauche, et Oualid El Hajjam (31 ans), à droite. Cette arrière-garde a encaissé 19 buts en 38 journées, record égalé détenu par l'AC Ajaccio en 2021-2022.
Elsner a mis au point un 4-3-3 pas forcément original par son animation, mais redoutablement efficace. Et, en L2, c'est souvent la clé pour réussir un exercice plein. Reste à savoir si la moyenne d'âge de 23,5 ans suffira dans l'élite pour aller décrocher le maintien, mais nul doute qu'elle risque d'augmenter avec les nouvelles recrues.
À part le travail du coach qui a été crucial, celui du trident chargé du recrutement a été décisif. Lorsque Mathieu Bodmer, Mohamed El Kharraze et Julien Momont sont intronisés, l'objectif est de mettre en place un effectif cohérent par rapport aux caractéristiques de la Ligue 2. Et même si cela se fait sans moyens et dans la précipitation, les choix sont justes. On commence par signer les premiers contrats pros, ensuite, on met en place le staff technique, avant de recruter les premiers joueurs qui seront importants : Oualid El Hajjam, Gautier Lloris, Christopher Operi ou encore Yann Kitala.
Effectif renouvelé, objectif maintien et "poil à gratter" de la Ligue 1
Avec un budget hyper restreint, ce fameux trident s'est attelé durant les premières semaines du mercato estival 2023 à façonner un effectif approprié à la Ligue 1. Huit joueurs ont déjà intégré l'effectif : Loïc Nego (libre), Cheick Doumbia (libre), Issa Soumaré (Wilrijk, 400 000 €), Yoann Salmier (libre), Kandet Diawara (libre), Daler Kuzyaev (libre), Rassoul Ndiaye (Sochaux, 1,5 million d'€), Abdoulaye Touré (libre).
La stratégie mise en place il y a un an continue d'être la même : viser des recrues sans indemnité de transfert. En tout, Le Havre a, jusqu'à présent, "gaspillé" environ 2 millions d'euros en transfert. Les Normands doivent faire avec le plus petit budget de Ligue 1 et en un an, sur 25 recrues, 23 étaient libres.
La philosophie et l'idée de jeu de l'équipe se doivent être audacieuse. Jean-Michel Roussier, Mathieu Bodmer et Luka Elsner sont sur la même longueur d'ondes : la saison sera compliquée, il y aura des changements au sein du onze – logique, impossible de jouer en Ligue 1 comme en Ligue 2 –, mais les Havrais veulent se faire une réputation rapidement dans l'Élite.
"Concernant notre style de jeu, on veut rester ambitieux. Avoir le ballon et des idées pour l’utiliser, on veut être une équipe difficile à jouer qui rende fiers nos supporters. En Ligue 1, on va découvrir des équipes performantes dans les transitions avec des grosses qualités techniques. On va parfois affronter les meilleurs joueurs du monde qui peuvent, comme Mbappé, à eux seuls gagner un match. Il faut en être conscient de ça, mais je pense que nos joueurs seront au niveau pour que l’on soit le poil à gratter de cette ligue 1."
Voilà la définition de ce que doit être le club doyen du football français selon son directeur sportif. Ses mots, qui ont été dits à France Télevisions au moment de la reprise, marquent la tendance. Le Havre va lutter pour le maintien, mais ce dernier se veut d'être l'équipe surprise, celle qui réalise des performances intéressantes et qui obtient des résultats clés face à des équipes à première vue plus fortes.
Malgré tout, les dernières semaines du mois d'août seront cruciales pour Le Havre. Le secteur offensif se doit d'être renforcé, au regard des profils présents dans l'effectif (Josué Casimir et Antoine Joujou) et au vu des résultats lors des matches de préparation (défaite 2-0 face au PSG, défaite 3-2 face au LOSC, défaite 2-0 face à Lorient). Des manquements que le coach a ciblés et que la direction sportive fait tout pour combler. Il faudra donc s'attendre à de nouvelles arrivées d'ici au 31 août, alors que Daler Kuzyaev, recrue phare de ce mercato pour les Havrais, a déjà impressionné en interne.
Un profil dont Le Havre avait grandement besoin. À 30 ans, avec 46 sélections à son compteur, un quart de finale à la Coupe du monde 2018 et trois matches disputés à l'Euro 2021, le Russe arrive en Ligue 1 après dix saisons dans son championnat natal, dont six dans le club du Zénith Saint-Pétersbourg. Expérience, éthique de travail, capacité à se projeter et même pour marquer, voilà ce qui se dit en interne de ce milieu relayeur arrivé au HAC pour réaliser sa première expérience en Europe.
