Fribourg - Eintracht Francfort : une affiche de "hipster" ?
C'est une rencontre cruciale pour les deux équipes, car elles sont à égalité de points à l'heure où on écrit ces lignes : 30 chacune. Cela fait donc plus de 2 points glanés en moyenne, c'est la première fois que ces deux clubs sont aussi compétitifs au même moment. L'occasion idoine afin d'évoquer leurs dynamiques respectives.
Une très bonne gestion interne
À l'image du RC Lens en France, qui est l'un des meilleurs exemples possibles, le SC Fribourg et l'Eintracht Francfort font partie des meilleurs en Allemagne sur le plan de la gestion saine d'un club de football dans le but d'une progression à moyen-long terme. Depuis maintenant 5 ou 6 ans, ces deux clubs de Bundesliga ne font que progresser saison après saison.
Lorsqu'on s'intéresse aux fonctionnements internes, on se rend compte que l'atmosphère est équilibrée, il n'y a pas de lutte pour le pouvoir, ou en-tout-cas, cela ne nuit pas à l'intérêt de l'institution, des joueurs et du staff, ni des employés. Chaque pôle travaille main dans la main : entre le sportif, le technique et la partie recrutement, puis le board. Lorsqu'il y a des erreurs de parcours, les décisions sont calculées et non prises de façon précipitée. Lorsque la dynamique est négative, on laisse alors la tempête passée en maintenant la confiance parce qu'on sait que le staff et les joueurs sont capables d'inverser la tendance. Tout cela est vérifiable au sein du SCF et de la SGE.
La durée de vie des mandats est par ailleurs un indicatif de la bonne santé d'un club. Du côté de Fribourg, on a un certain Christian Streich, l'entraîneur, qui est en place depuis 2011. Une durée exceptionnelle rendue possible - évidemment par ses compétences - mais également parce que ses dirigeants l'ont laissé travailler. Aujourd'hui, les résultats leur donnent raison. L'un des adjoints, Patrick Baier, est là depuis 2009 et le directeur du recrutement, Klemens Hartenbach, est présent à Fribourg depuis 2013.
Concernant l'Eintracht, le président, Peter Fischer est à la tête des Aigles depuis 2000. Le directeur du centre de formation, Karl-Heinz Körbel est à Francfort depuis 2010. Enfin, quant au staff, la confiance est maximale, puisque même lorsque la situation en championnat a été délicate, aussi bien la saison dernière (11e) qu'en début de saison, Oliver Glasner n'a pas été démis de ses fonctions. Encore une fois, la direction a eu raison de laisser du temps à l'Autrichien, car l'Eintracht n'a pas perdu un match de Bundesliga depuis le 8 octobre.
Deux entraîneurs aux préceptes modernes
Sans tomber dans la caricature, il est intéressant d'évoquer les idées de jeu de Streich et de Glasner, car c'est aussi grâce à celles-ci que leur collectif respectif fonctionne aussi bien. Cette saison, au regard des deux effectifs, les deux hommes ont dû parfois se montrer réalistes et pragmatiques afin d'espérer gagner le plus de matches possibles. En d'autres termes, chaque match de Fribourg et de l'Eintracht ne sont pas tous spectaculaires.
Néanmoins, depuis plusieurs saisons, les deux entraîneurs se sont démarqués par plusieurs préceptes, dont l'école allemande est désormais pleinement imprégnée. Jürgen Klopp en est notamment à l'origine, et a, en partie, refaçonné la Bundesliga au tournant des années 2010, même si la révolution a été amorcé au début du siècle - notamment par DfB qui a compris que le football allemand devait se réinventer pour gagner.
De ces faits, Streich et Glasner ont montré, saison après saison, que leur football se voulait tourné vers l'avant, être le moins restrictif possible, avec une donnée supplémentaire : l'intensité à tous les niveaux, c'est-à-dire avec et sans ballon, face au jeu, dos au jeu. Du pressing, du contre-pressing, de la verticalité, c'est aujourd'hui cette recette qu'applique les clubs allemands afin d'espérer détrôner un jour le Bayern Munich.
À l'échelle européenne, Francfort a prouvé que la direction était bonne avec la victoire en Ligue Europa, la première pour un club allemand depuis le FC Schalke 04 en 1997.
Deux très bons effectifs
Enfin, la réussite de ces deux entités tient également dans la faculté à renouveler et donc posséder un effectif solide saison après saison, malgré les départs, parfois, des meilleurs éléments. Les cellules de recrutement fonctionnent très bien.
Du côté de Fribourg, on a bien évidemment Vincenzo Grifo, qui régale par sa vision de jeu, son sens du collectif et de la passe depuis plusieurs années, mais encore plus depuis le début de saison. Avec 9 buts et 2 passes décisives en 15 journées, il est le joueur-clé de Streich. L'international italien n'a pas hésité à la remercier il y a quelques jours dans une interview pour BILD. Ritsu Doan, le Japonais, est aussi une super pioche. Il est arrivé l'été dernier en provenance du PSV Eindhoven et occupe désormais l'aile droite de Fribourg, grâce à ses facultés de percussion et de dribble, tout en étant bon dans le dernier geste.
Au sein de l'effectif de Glasner, se trouve une autre perle venue d'Asie : Daichi Kamada. Celui qui était présent à la Coupe du monde 2022 progresse exercice après exercice et pourrait, grâce à ses 7 buts et 4 passes décisives en 14 matches de Buli, découvrir un nouvel environnement dans un grand club européen la saison prochaine. L'Eintracht, avec Randal Kolo Muani, a sans doute décroché le gros lot en recrutant l'ex-Nantais. Alors qu'il est arrivé l'été dernier en Allemagne, il est déjà un titulaire indiscutable et représente une arme redoutable. Il a délivré une passe décisive pour Jesper Lindström le week-end dernier face à Schalke. Lindström, justement, est une énième incarnation du bon recrutement de la SGE ces dernières saisons. Le Danois est un diamant brut.
Nul doute qu'il devrait faire mal lors de la rencontre au sommet ce mercredi soir, comme d'autres joueurs présents sur la pelouse. Le spectacle promet d'être au rendez-vous.