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Interview Flashscore - Valentin Porte : "Le sport n’est pas le monde des Bisounours"

Valentin Porte durant les Jeux olympiques de Paris 2024.
Valentin Porte durant les Jeux olympiques de Paris 2024.LECOCQ CEDRICK/ MSPKMSP via AFP
En août dernier, la défaite en quarts de finale des Jeux olympiques a marqué la fin de carrière internationale de Valentin Porte. Le joueur de Montpellier n’en a pour autant pas fini avec le handball. Plein d’ambition pour l’avenir, il revient, pour Flashscore, sur les dernières semaines avec les Bleus et sur ses objectifs avec le club héraultais pour la saison.

Une page s’est tournée pour Valentin Porte après la terrible désillusion subie par l’Équipe de France de handball lors de “ses” Jeux, face à l’Allemagne, en quarts de finale. Cette défaite en prolongations, propice à de nombreux débats, aura finalement été la dernière rencontre internationale d’un gaucher gaillard au palmarès XXL : champion olympique, double champion du monde et champion d’Europe, entre autres. 

La fin d’un chapitre mais pas d’une ère. Le train-train de la saison handballistique a repris et l’ancien capitaine des Bleus se rive désormais sur son rôle en club. 

Les habitués de la Liqui Moly Starligue et des joutes internationales connaissent Valentin Porte et savent qu’au jeu de l’interview, ce dernier est l’un de ces fameux bons clients, rarement taciturne. Ce fut à nouveau le cas lors de notre échange de près de trente minutes, à la veille d’une rencontre du MHB face à Limoges (victoire 32-26). Au programme, souvenirs en Bleus, avenir en club et même, padel ! 

Flashscore : Bonjour Valentin, avec la reprise du championnat et le retour à une certaine routine, la déception des JO a-t-elle été atténuée ? 

Valentin Porte :"Elle a un peu diminué et c’est obligatoire de passer à autre chose. On reprend vite en club, on se tourne vers de nouveaux objectifs, donc ça aide aussi un à oublier ce qu’il s’est passé. Ça restera quand même une belle aventure, une belle compétition mais une fin un peu terrible, c’est clair. Maintenant ça fait un moment que je me suis tourné vers autre chose". 

Double fin pour vous qui plus est… 

"Oui, c’est ce qui accentue la déception. On veut tous un peu vivre dans le monde des Bisounours en disant : “Arrêter là-dessus, sur une médaille aux Jeux olympiques en France, ce serait génial”. Mais le sport nous rappelle que ce n’est pas le monde des Bisounours et que ça ne se passe pas toujours comme un rêve. C’est une fin. Pas celle que j’imaginais mais une fin quand même". 

N’aurait-ce pas été moins dur si les Jeux avaient eu lieu à l’étranger ? 

"Oui et non. Il y a quand même de magnifiques souvenirs qui resteront pour toujours. Vivre ça à domicile avec un public qui a répondu présent… L’engouement était monstrueux. Jouer un dernier match dans une salle magnifique devant son public, même si la fin n’est pas celle que l’on avait imaginée, ça reste des moments pour lesquels on a choisi ce métier". 

Justement à propos de ce match face à l’Allemagne à Lille. Vous aviez déjà joué au stade Pierre-Mauroy sous cette configuration en 2007, lors du Mondial en France. Était-ce tout aussi fort ? 

"Non, c’était plus fort encore. 2017, ça remonte mais cet été ce fut encore plus fort de par les Jeux olympiques et la saison. En janvier 2017, les conditions étaient plus fraîches et même s’il y avait de l’ambiance, là c’était assez hallucinant. Ça m’a vraiment marqué tout au long des Jeux. J’ai l’habitude de me déplacer toutes les semaines en championnat et j’ai l’impression qu’en France, on a plus un public de spectateurs que de supporters. Là j’ai découvert du vrai supportérisme et c’était grandiose". 

Maintenant que la page équipe de France est tournée, quel est le plus beau souvenir qui ressort ? Le titre olympique ? Le titre mondial à la maison ? 

"J’ai eu la chance de connaître plusieurs titres ! Mais si je devais hiérarchiser, un titre olympique reste quelque chose d’exceptionnel dans une carrière de sportif. C’est dur de l’occulter. Après si je veux aller un peu plus loin que le sport, c’est vrai que le titre en 2017 était magnifique aussi. Gagner chez soi, devant son public… J’avais la chance d’avoir toute ma famille, mes parents et mes deux petites sœurs pour le dernier carré. J’ai encore une photo où on est tous les cinq en train de partager ce moment. Ça marque, tu ne vis pas ça tous les jours et tu fais aussi ce sport pour partager avec les gens que tu aimes". 

Comment se passe ce début de saison avec Erick Mathé ? 

"Ça se passe plutôt bien. On a encore besoin de temps mais il joue en notre faveur avec un seul match par semaine pour l’instant. Il faut qu’on apprenne à tous se connaître avec le nouveau staff (NDLR : Baptiste Nicot arrivé en tant qu’entraîneur adjoint et Frédéric Marcerou en préparateur physique). Ce sont quand même de sacrés changements et comme la prépa ne s’est pas faite avec l’effectif complet, cela rajoute des difficultés pour ce nouveau staff". 

Qu’est-ce qui change par rapport à Patrice Canayer

"Forcément beaucoup de choses. L’avantage c’est qu’Erick connaissait très bien le club et Patrice mais comme on en avait discuté, il n’allait pas faire du Patrice Canayer parce que ça servirait à rien (sic). Il apporte aussi des nouveautés, dans le programme, dans la planification. On fait des journées continues en arrivant à la salle vers 9h le matin et jusqu’à 16h30, un peu comme ce qu’il se fait au rugby. On fait deux entraînements, des réunions où on peut échanger et ça laisse du temps pour pas mal de choses sur la technique, la tactique ou le physique". 

Vous avez mentionné ce besoin de temps en début de saison. Cela s’est fait ressentir lors de la rencontre à Tremblay où vous étiez menés à la mi-temps (score final 31 - 34)… 

"On était même menés de cinq buts en première et oui, ça en fait partie. Je l’ai rappelé dans le vestiaire et en réunion, c’est un premier avertissement, surtout qu’on sortait d’un match maîtrisé de bout en bout (NDLR : Face à Saint-Raphaël lors de la J1). On se fait bousculer chez un promu et ça nous rappelle qu’il y a ni petit match, ni petite équipe dans cette compétition. Il faut s’employer et ça me pousse à prendre l’exemple d’une équipe comme le PSG qui peut se permettre de gérer et peut-être de jouer un match à 80%. Nous on n’a pas cette marge et il faut être à 100% à chaque fois. Et il faudra prendre Tremblay au sérieux, on a vu qu’ils sont allés gagner à Aix la journée d’après". 

Vous faites donc un bon résultat à Tremblay ! 

"Bon je ne sais pas ! Ce qui m’intéresse c’est la victoire. D’un but ou de dix, ça fait toujours deux points à la fin. Donc on l’a fait à l’extérieur et face à une équipe qui sera capable de poser des problèmes à beaucoup de monde. Premier déplacement de l’année et petit avertissement qui doit nous permettre de continuer sur notre lancée". 

Votre président Julien Deljarry a fixé de grands objectifs entre la Coupe d’Europe, le championnat et la Coupe de France. La blessure de Stas Skube (ligaments croisés) pour la majeure partie de la saison remet-elle cette ambition en cause ? 

"Une équipe comme le Montpellier handball ou n’importe quelle équipe sans Stas Skube, c’est plus dur. C’est un génie du handball qui connaît par cœur ce sport et qui sait mener une équipe. C’est un peu un demi-centre à l’ancienne qui fait bien jouer ses partenaires. Jouer sans lui est forcément plus dur mais on a un effectif qui nous permet d’exister. Après, il ne faudrait pas qu’il y ait d’autres pépins". 

C’est un vrai coup dur… 

"D’autant plus que j’avais retrouvé Stas en pleine forme cet été. Il avait fait une très bonne prépa et je trouvais qu’il avait évolué dans son état d’esprit. Il prenait plus de place, s’investissait de plus en plus et il se sentait mieux avec la langue. Tous les voyants étaient au vert et cette blessure à une semaine de la reprise, c’est dommageable. 

Avez-vous un rôle particulier à jouer avec les jeunes joueurs de l’effectif en tant que capitaine et votre expérience ?

"C’est quelque chose d’assez naturel de transmettre et d’aider chez moi. J’essaie de montrer l’exemple tous les jours à l’entraînement et en match, c’est mon credo en tant que joueur expérimenté. Maintenant on peut arriver et voir que des joueurs de 23/24 ans traînent la patte et se plaignent : si ces mecs-là voient ceux de 34 ans se bouger, ça va les pousser eux aussi à avancer. Ça passe aussi par la parole sur ce genre de très jeunes joueurs, c’était le cas avec Bryan Monte la saison dernière. Je ne dis pas que j’ai la sainte parole mais ma carrière parle pour moi et j’essaie de donner les clés à ces jeunes joueurs pour durer et être performants. 

C’est vrai avec la pépite Djordje Cikusa, débarqué cet été à Montpellier en prêt de Barcelone et comme vous, arrière droit. 

"On voit arriver un joueur comme ça et on se dit que ça va le faire mais faut se rappeler que c’est un gamin qui a 18 ans ! Il y en a pas beaucoup qui ont joué en pro à un niveau pareil à 18 ans. C’est quelqu’un qu’il faut accompagner, guider et aider pour qu’il soit performant. Pour lui et pour nous. Il faut qu’il soit bon pour que je puisse me reposer un peu (rires)". 

Vous jouez beaucoup depuis le début de saison. 

"Énormément ! Heureusement qu’on n’a qu’un seul match par semaine en septembre. Ça n’a pas été facile de remettre la machine en route. Je me sens bien mais pas encore à 100%, je dois bosser sur moi pour retrouver ma forme optimale avant de penser aux autres". 

Votre contrat avec Montpellier prend fin en 2027. Comment voyez-vous l’avenir ? 

"J’ai jamais réfléchi à mon avenir à long terme parce que ce n’était pas ma façon de voir les choses. Je suis jusqu’en 2027 à Montpellier donc je me concentre sur l’avenir proche pour être le plus performant possible. J’aurai 37 ans en 2027, il faudra voir mais je l’ai toujours dit, tant que je prends du plaisir à jouer au handball, je jouerai. C’est mon état d’esprit et le plaisir que je prendrai qui décideront de ce que je fais par la suite mais pour l’instant, je me concentre sur les trois ans qui me restent pour savoir où cela va m’emmener. 

Vous n’avez jamais joué à l’étranger. Avez-vous déjà eu des propositions concrètes par le passé ? 

"J’ai eu des discussions mais finalement, pas tant que ça. Il faut dire que j’ai souvent signé des contrats longue durée et je ne laissais pas beaucoup de place à la négociation. Je me mets aussi dans la case des joueurs un peu atypiques, je ne crève pas l’écran comme Dika Mem ou Melvyn Richardson, des mecs qui sortent du lot et qui ont des qualités bien définies. Je suis plus un joueur de l’ombre et de devoir, ça attire peut-être moins l'œil. Mais aujourd’hui, je n’ai aucun regret et je suis très content des choix effectués durant ma carrière". 

Et vous avez gagné la Ligue des champions ! 

"En plus ! C’était un bon choix". 

On vous sait amateur de padel notamment grâce à votre compagne, professionnelle (NDLR : Wendy Barsotti, 143e mondiale en septembre). C’est un projet pour l’après-carrière, comme avec le golf ? 

"Je suis un drogué du sport. J’aime toucher à tout et je me débrouille un peu partout. J’ai commencé le golf il y a quelques années et c’est un échappatoire. Prendre son sac, ses clubs et aller sur un parcours… Ça vous permet de déconnecter, tout en gardant un esprit de compétition puisqu’on se tire forcément la bourre avec les gars. 

"Le padel c’est pareil. J’ai découvert ce sport un peu comme tout le monde et j’y ai pris goût, j’ai commencé à m’entraîner… Je suis allé rejoindre ma compagne lorsqu’elle était en Espagne et je me suis préparé pendant une semaine comme un joueur pro : physique, tactique, technique. Tous les jours, c’était génial. J’ai gagné quelques compétitions depuis et je commence à avoir un niveau tout à fait correct". 

Parler d’échappatoire nous guide vers l’aspect mental du sportif. En dévoilant votre dépression en 2022, vous avez eu un rôle de précurseur chez les sportifs de très haut niveau, ouvrant la voie à d’autres en difficulté. Comment allez-vous aujourd’hui et selon vous, qu’est-ce qui a changé ?

"Je vais bien ! J’ai eu, comme beaucoup je pense, une période très compliquée. Ça m’est tombé dessus et ça m’a chamboulé. Dans mon sport et ma vie, j’aimais bien être une machine, tout contrôler. C’était le problème". 

"Maintenant j’ai ouvert les yeux et je vois les choses différemment. Je suis capable de déconnecter : quand je range les chaussures dans le casier, on coupe, la vraie vie commence. J’ai revu mes priorités, je m’investis toujours autant à l’entraînement mais je suis capable de déconnecter en dehors. Je prends du temps pour les choses importantes de la vie. Quand on prend du recul, une carrière de sportif est éphémère et si le jour où ça s’arrête, tout tourne autour de ça et qu’il n’y a rien de concret, les problèmes démarrent. Moi je m’en suis rendu compte au bon moment et ça m’a permis de gérer les choses différemment". 

En parler était important ? 

"Ça ne me dérangeait pas et tant mieux si cela pouvait aider certaines personnes. Même une, c’est le principal. Mettre en lumière le sport de haut niveau était l’objectif aussi. C’est beau mais ça demande aussi beaucoup de sacrifices. Tout n’est pas rose dans ce métier. Aujourd’hui je vais beaucoup mieux et je vais gérer différemment le reste de ma carrière". 

Les choses ont changé dans le milieu sportif ? 

"J’ai eu quelques commentaires de sportifs qui m’ont dit que c’était bien et que ça les avait aidés. Ça n’a pas tout changé pour autant". 

En guise de conclusion, que peut-on vous souhaiter pour cette saison, collectivement et individuellement ? 

"Individuellement, c’est évidemment la santé, sans blessure pour la saison. Pour le club,  qu’on continue à se stabiliser et à bien se développer pour retrouver les sommets dans les années à venir". 

France gouvernement

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