Interview Flashscore - Sofiane Oumiha : "Pas fermé à l'idée d'aller boxer à l'étranger"
Flashscore : Vous venez de remporter la toute première EUBC Cup au Monténégro en - 60kg et vous enchaînez avec un combat professionnel ce mercredi dans le cadre de l'IBA Champions' Night, ça vous fait une période très chargée !
Sofiane Oumiha : Effectivement, j'ai remporté cette nouvelle compétition et je suis dans une forme de continuité puisqu'il y a trois semaines j'ai gagné à Monaco le 23 septembre dernier contre Nicolas Ariel Blanco puis je suis revenu en boxe olympique avant d'avoir ce nouveau combat au Forum des Halles.
Vous allez affronter le Bulgare Radoslav Rosenov en main event à Westfield Forum des Halles, le même boxeur qu'en finale au Monténégro mais cette fois chez les pros. Votre présence était prévue ou la blessure au nez d'Estelle Mossely (également la promotrice de la soirée via Double Y Boxing) a changé vos plans ?
J'étais déjà inscrit sur la carte parce que je voulais enchaîner. Il fallait simplement attendre par rapport à mon état de forme après l'EUBC Cup et savoir si je serais en état. La blessure d'Estelle me fait passer en main event mais quoi qu'il en soit, je devais être de la partie.
En termes de préparation, y a-t-il des adaptation à effectuer pour valider cette transition ?
En boxe olympique, il vaut aller vite dans le combat alors que chez les professionnels, c'est plus posé, plus dans l'efficacité et dans la volonté de faire mal. On verra ce mercredi par rapport à la vitesse notamment ça parce qu'on reste tout de même sur un schéma de boxe olympique, c'est-à-dire toucher sans se faire toucher. Pour Rosenov, ce sera une première car il n'a jamais boxé plus de 5 rounds et ce seront 6 rounds de 3 minutes.
Vous avez la réputation d'être un technicien, un boxeur fin, et souvent la difficulté est de franchir ce cap entre les deux styles, vous le ressentez ?
Au départ, quand je suis passé professionnel et que je suis revenu en boxe olympique, j'ai trouvé ça super dur parce que j'avais perdu ce rythme spécifique. J'essaie de mieux poser ma boxe mais toujours en conservant cette idée de toucher sans se faire toucher. Il y a des difficultés, je ne vais pas le cacher mais, pour le moment, tout se passe bien.
Il y a ce combat mercredi mais on est aussi obligé de penser à 2024 et à cette médaille d'or qui est le but d'une vie ?
C'est exactement ça et on travaille dur pour ça. Ce seront mes troisièmes JO, j'espère que ce sera la bonne mais je ne me prends pas la tête, ce qui doit arriver arrivera. Je mets tous les moyens pour y parvenir, au maximum. Évidemment, c'est à Paris, devant notre public, il y a l'envie de bien faire. Il faut gérer la pression mais tout va bien se passer de ce côté-là.
La difficulté pour les media, c'est précisément d'en faire... sans trop en faire pour ne pas écraser les athlètes sous les attentes.
C'est certain que ça peut avoir l'effet inverse, devenir négatif. Les JO sont tous les 4 ans et beaucoup de sports attendent ce moment-là pour être médiatisés. Personnellement, je ne le vois pas comme quelque chose de négatif. Au contraire, ça galvanise. C'est en France alors autant donner le meilleur de nous, montrer notre talent, ramener une médaille et faire parler de nous.
Après les JO, ce sera un focus total sur votre carrière professionnelle ?
Oui, parce que ça deviendra difficile de faire les deux, d'autant que la nouvelle génération arrive. Pour moi, ce sera le monde pro... à moins que je ne m'aligne aux championnats du monde pour obtenir une quatrième étoile pour entrer définitivement dans l'Histoire.
Un certain Manny Pacquio aimerait bien disputer les JO, même s'il a dépassé l'âge limite pour pouvoir s'aligner, vous en pensez quoi de cette éventualité ?
Manny Pacquiao est connu dans le monde de la boxe mais pas uniquement. S'il vient aux JO, ça fera parler de nous. Ce n'est que du positif et c'est une chance. S'il vient, il ne prendra la place de personne si son comité de sélection aux Philippines estime qu'il est le meilleur de sa catégorie. En revanche, pour faire une médaille ce sera autre chose.
De nombreux boxeurs français se sont exilés pour avoir de meilleures conditions de travail et davantage d'opportunités, vous l'envisagez ?
La boxe, ça dure pas toute une vie, donc s'il faut sortir de sa zone de confort, il faut le faire. Si l'occasion se présente, je ne suis pas fermé à cette idée d'aller boxer à l'étranger.
La catégorie des légers est très relevée et vous pourriez obtenir des combats de grande qualité relativement rapidement.
C'est sûr mais il ne faut pas oublier que la boxe est un business. Il faut trouver le bon adversaire, mettre de l'argent sur la table. Pour monter dans les classements, c'est tout un suivi sur le long terme. Il faut être structuré, encadré, avoir les moyens. C'est ce que je recherche pour après les JO.
Est-ce que vous ressentez une forme de difficulté pour attirer le public français vers la boxe professionnelle alors qu'il vous soutient aux JO, comme cela avait été le cas pour la Team Solide en 2016, au point que cela peut conduire à des critiques envers vous par la suite ?
Pour le grand public, le boxeur français doit rester à sa place. S'il gagne, il ne faut pas que ce soit trop et s'il perd, il se fait descendre, souvent de manière injuste. Pour être honnête, la boxe a du mal à décoller en France et c'est pour ça que les JO sont si importants car tu te fais connaître à ce moment-là, par ta façon d'être. Pour la boxe pro, c'est plus compliqué mais on va y arriver !
On a des résultats et on parviendra à faire changer cette image. Avec du temps et de la persévérance, on proposera de la boxe pour le grand public et être reconnu à notre juste valeur. Mais pour ça, il faut de l'argent, des télés, des vrais combats, pas contre des faire-valoir, et notamment des oppositions entre Français. J'espère qu'un jour on aura cette culture qu'on peut voir en Angleterre ou en Allemagne.