Kishane Thompson, à 5 millièmes de succéder à Usain Bolt
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Pour sa toute première compétition internationale, le musculeux jamaïcain Kishane Thompson (23 ans) en argent, a seulement buté sur l'Américain Noah Lyles, mais a pris date pour le futur et se présente comme l'héritier de la légende aux huit titres olympiques, Usain Bolt.
Les spécialistes notent plutôt sa ressemblance en style avec un autre illustre jamaïcain, Asafa Powell, éphémère recordman du monde avant l'avènement de "la Foudre".
"Il y a une vraie filiation entre Thompson et Powell. Thompson est cependant plus puissant, plus volumineux que Powell et peut aller plus vite qu'Asafa", estime l'ex-entraîneur de sprint Pierre-Jean Vazel.
Talentueux
Kishane Thompson est membre de l'illustre MVP Track Club à Kingston, fabrique à champion, où il est couvé par les frères Stephen et Paul Francis, les anciens coachs de Powell, qui avaient aussi entraîné les championnes olympiques Elaine Thompson-Herah et Shelly-Ann Fraser-Pryce au début de leurs carrières.
"Stephen Francis m'a toujours dit que j'étais talentueux, qu'il voulait que je croie en moi", dit Thompson.
La double championne du monde du 200 m Shericka Jackson et les sœurs Tina et Tia Clayton, relève du sprint jamaïcain, s'entraînent également au MVP.
"Nous n'avons pas vu un sprinteur aussi puissant depuis Asafa Powell, un athlète qui peut partir aussi bien, être fort en transition pour se porter en tête aux 65 mètres pour finir le travail", juge l'Américain Justin Gatlin, champion olympique de la ligne droite en 2004.
Thompson s'était révélé aux suiveurs de l'athlétisme lors des séries des sélections jamaïcaines pour les Mondiaux 2023, avec un chrono très costaud de 9''91, lui qui n'avait jamais fait mieux que 10''21.
Sous les ordres de son entraîneur, Thompson n'avait pas disputé les demi-finales et donc zappé les Mondiaux de Budapest. À la place, il avait confirmé son chrono lors de meetings relevés (9.85 en Chine, 9.87 aux États-Unis).
Thompson n'est réapparu en compétition que neuf mois plus tard pour flamber aux sélections olympiques jamaïcaines, avec un chrono de 9''77 en finale, son record.
Destin
Le sprinteur était passé sous les radars plus jeune en raison de blessures récurrentes, au niveau d'un tibia et des ischio-jambiers. Il n'avait ainsi pas pu disputer la compétition scolaire de référence pour les jeunes cracks du sprint jamaïcain, les "Boys and Girls".
"Je n'ai jamais pensé faire autre chose. J'ai toujours compris mon destin, mon potentiel, même si plus j'essayais, plus je semblais reculer. Ça m'a forcé à ne jamais abandonner, à en faire plus", a-t-il expliqué au média jamaïcain Nationwide.
Son compatriote et concurrent Oblique Seville, 8ᵉ de la finale dimanche, se rappelle leurs joutes entre 14 et 16 ans. "Personne ne le connaissait, mais moi oui, nous étions dans la même division. Il n'avait pas pu exprimer son potentiel à cause de ses blessures", expliquait Seville à l'AFP début juillet.
Thompson vient de Mitchell Town, village du sud de la Jamaïque près de la mer des Caraïbes, dans la Paroisse de Clarendon, durement touchée par l'ouragan Béryl il y a un mois.
"Ma vie a été humble jusqu'ici, nous n'étions ni dans les pires ni dans les meilleures conditions matérielles, j'ai dû travailler dur, rien ne m'a été donné", dit-il.
Il a fréquenté le lycée Bustamante puis Garvey Maceo, où il a été entraîné par Neville Myton, ancien mentor de Veronica Campbell Brown (8 médailles olympiques).
"Bigga", son surnom, avait refusé ensuite l'offre d'une petite université américaine pour ne pas s'éloigner de son frère jumeau, Kishaun. Il y a un an, il publiait sur ses réseaux sociaux un texte prémonitoire : "je ne cesserai jamais de poursuivre mes rêves (...) Je ne suis pas le plus connu, mais j'utiliserai ça à mon avantage pour surprendre tout le monde".
Il a presque réussi dimanche sur la grande scène olympique.