Le pragmatisme instauré par Peseiro sera-t-il suffisant au Nigéria pour aller au bout ?
Structure tactique bien huilée, des consignes appliquées à la lettre, l'art du pressing comme principe, des noms comme Victor Osimhen, Victor Moses et Ademola Lookman pour effrayer : le Nigéria n'a pas remporté toutes ses rencontres, mais impressionne dans sa manière de penser le football et de jouer. Dans une CAN 2024 remplie de surprises, les Super Eagles sont les derniers grands favoris en lice après l'élimination du Maroc, du Sénégal et de l'Égypte. Logique tant le football proposé depuis le début de la compétition est fait pour aller au bout.
Tenu en échec par la Guinée équatoriale (1-1) lors de son premier match, le Nigéria a ensuite assuré deux victoires par le plus petit des écarts contre la Côte d'Ivoire (1-0) et la Guinée-Bissau (1-0). En 1/8ᵉ de finale, un but avant la pause et un autre en toute fin de match, ont assuré la qualification pour les quarts de finale. Réaliste et efficace, c'est ainsi qu'on peut définir le groupe de José Peseiro.
Joue-la pragmatique à la portugaise
Les résultats le démontrent, le Nigéria est une équipe qui joue la victoire coûte que coûte, peu importe la manière. Par contre, la forme, elle, est travaillée aux détails près et l'entraîneur portugais s'est appuyé sur les forces et qualités de ses joueurs pour instaurer au mieux son idée de jeu. L'idée est d'être le plus pragmatique possible, cherchant constamment l'erreur de l'adversaire dans ses trente derniers mètres pour pouvoir l'enfoncer. La patience est l'autre précepte mis en place par Peseiro : le but tombera, il faut juste savoir se montrer efficace quand l'opportunité se présente.
L'entraîneur portugais a instauré un 3-4-3 qui a pour objectif de mettre sous pression l'adversaire lorsque la balle est dans son camp, notamment grâce aux efforts de l'infatigable Victor Osimhen. L'idée est de couper les relations du rival entre sa ligne défensive et sa ligne du milieu et de la pousser à jouer long. Les défenseurs Ajayi (1,93 m), Troost-Ekong (1,91 m) et Bassey (1,85 m) sont là pour gagner les duels dans les airs, tandis que les milieux Iwobi (86 récupérations depuis le début de la compétition) et Onyeka (44) assurent le gain des seconds ballons, avant de relancer.
Offensivement, le Nigéria agresse dans la profondeur avec la répétition des courses verticales du Ballon d'or africain 2023, de Victor Moses et de Ademola Lookman. À force, les équipes s'épuisent. Et les Super Eagles, eux, qui rencontrent un léger manque de réussite offensif, marquent ce qu'il faut : sur 7,5 buts attendus (xG) sur l'ensemble de la compétition, le Nigéria a trouvé le fond des filets à 5 reprises.
Et dans les chiffres, qu'est-ce que ça donne ? Le Nigéria n'est pas une équipe de possession (18ᵉ sur 24 avec 44,7 % par match et 19ᵉ avec 248,0 passes réussies). Par contre, elle est celle qui concède le moins de buts par match (0,3), qui a le taux d'xG concédés le plus faible (1,6) et qui est l'équipe avec le plus de clean sheets obtenus (3) - avec l'Afrique du Sud.
Taillé pour aller au bout ?
La formule de José Peseiro est donc simple, il joue sur un onze très solide défensivement et ses joueurs s'appuient sur la moindre opportunité pour la mettre au fond, avant de tenir le résultat. Une stratégie utilisée par d'autres entraîneurs portugais comme José Mourinho ou Fernando Santos par le passé.
Celle-ci fonctionne pour le moment et aucune équipe n'a su déstabiliser les Nigérians après que ces derniers ont ouvert le score. La seule fois où on a senti de la précipitation,
c'est lorsqu'ils ont été menés par la Guinée-Équatoriale.
Alors l'équipe est-elle taillée pour aller au bout ? Il y a de fortes chances, notamment au regard des individualités devant, qui peuvent retourner n'importe quelle situation si celle-ci se complique. L’adversaire capable de jouer sous pression pourra les mettre en difficulté, avec des défenseurs au jeu long de grande qualité, et des milieux présents et attentifs sur les seconds ballons.
Mais avec le Maroc et le Sénégal dehors, quelles autres équipes seraient capables de faire ça face à cette sélection qui parait imprenable ? Difficile à dire. Malgré tout, dans le football, très souvent, les chiffres ne veulent rien dire et, une fois que la réalité du terrain prend le dessus, après le coup de sifflet de l'arbitre, le récit devient tout de suite très différent.