Le rugby italien doit se trouver une identité propre et faire confiance à ses forces vives
L'Italie est-elle vouée à réaliser quelques coups entre deux cuillères de bois ? Membre du Tournoi des 6 Nations depuis 2000, les Azzurri ont connu quelques bonnes périodes mais n'ont jamais duré sur la longueur. Sauf miracle, les 1/4 de finale de la Coupe du monde resteront une contrée inconnue cette édition encore.
Dichotomie
Le rugby italien est à deux vitesse. D'un côté, le Benetton Trévise et les Zebre évoluent au sein de de la foutraque Celtic League qui comprend aussi des équipes irlandaises, écossaises, galloises et sud-africaines. Le bilan de la saison dernière n'est guère reluisant : le Benetton a terminé 11e sur 16 quand la franchise basée à Parme a perdu ses 18 matches. Avec une moyenne de spectateurs située aux alentours des 3000 avec des pics jusqu'à 4500-5000, les deux équipes sont dans la deuxième moitié de tableau des affluences en taux de remplissage (50% pour le Benetton, 60% pour les Zebre).
Mais qu'en est-il du championnat domestique ? Cette année, le septuple champion d'Italie, Calvisano, a déclaré forfait pour raisons financières et doit repartir en 3e division. Le naming du brasseur Peroni a pris fin après 4 saisons. En 2019, le Top 12 est devenu le Top 10 et, depuis 3 saisons, le titre se joue entre Rovigo et Petrarca devant une foule qui n'excède pas les 5000 spectacteurs quand la Nazionale peut remplir les 70000 sièges du Stade Olympique de Rome. À l'image de nombreuses disciplines capables de remplir une grande enceinte via son équipe nationale, l'Italie ne parvient pas à fidéliser pour les affaires courantes.
Près d'un quart de siècle sans sélectionneur italien
La diaspora a longtemps été la solution pour renforcer les rangs, de Diego Dominguez à Sergio Parisse, en passant par Ange Capuozzo. En football comme en rugby, les "oriundi" sont une tradition : la sélection dirigée par le Néo-Zélandais Kieran Crowley, coach du Benetton de 2016 à 2021, comporte 13 nés au-delà des frontières de la Botte.
Mais davantage que les joueurs, c'est l'absence d'un manager transalpin qui pose question quant au développement d'une identité de jeu italienne. De la nomination de Bertrand Fourcade en septembre 1989 à aujourd'hui, seul Massimo Mascioletti a dirigé la Nazionale pendant 7 matches en 1999 dont 3 défaites en coupe du monde (67-10 contre l'Angleterre, 28-26 contre les Tonga et... 101-3 contre les All Blacks).
Ainsi, depuis 2000 et l'entrée dans le Tournoi, trois Néo-Zélandais (Brad Johnstone, John Kirwan et Crowley), deux Français (Pierre Berbizier et Jacques Brunel), deux Sud-Africains (Nick Mallett, Franco Smith) et un Irlandais Conor O'Shea ont dirigé le XV italien.
Près d'un quart de siècle après son arrivée au sein des nations majeures du Vieux-Continent, l'Italie a réussi quelques grands matches mais n'est jamais parvenue à inscrire ces succès dans la durée. Avec un vivier limité en raison de la prégnance entre autres du football, du basket, du volley eu water-polo, le rugby transalpin n'a pas progressé comme espéré et voit même sa place au sein même du Tournoi remise en question. La génération de jeunes retraités doit à présent s'imposer aux postes stratégiques de terrain pour imprimer une nouvelle idée de jeu à la Nazionale qui, sans cela, continuera de pasticher et de vivre le mythe de Sisyphe.