Les Jeux de Paris "percutés" par la dissolution et la crise politique en France
À moins de 50 jours de cet événement qui promeut la paix et l'universalité, la France est entrée dimanche après les élections européennes dans une crise politique d'ampleur.
Le pays fait la une de la presse internationale, avec près de 40 % de voix pour l'extrême droite, un résultat qui a conduit Emmanuel Macron à décider de dissoudre l'Assemblée nationale.
L'imperturbable président du CIO, Thomas Bach, a assuré lundi matin en marge de la visite d'une école à Paris que les législatives en France, dont le second tour se déroulera le 7 juillet, trois semaines avant la cérémonie d'ouverture inédite sur la Seine, n'allaient "pas perturber les JO".
La France est "habituée à faire des élections", estime cet ancien champion d'escrime, qui assure voir une "grande unité en faveur des JO à Paris".
Tout en assurant que "rien ne viendra(it) gâcher la fête" olympique que l'Etat, les collectivités et les organisateurs préparent depuis des années, la maire PS de Paris, Anne Hidalgo, a elle marqué sa surprise, jugeant "extrêmement troublant" de dissoudre l'Assemblée avant les Jeux.
L'élection va "capter l'attention"
"L'élection va capter 100 % de l'attention. Et toute la phase de montée en puissance 'les JO dans trois semaines, deux semaines, etc', tout cela va être phagocyté par la politique", décrypte pour l'AFP l'ex-député spécialiste de sport Régis Juanico (PS). "Les JO vont être profondément percutés par cette campagne", ajoute-t-il.
"Ce n'est pas une bonne nouvelle pour les JO, c'est beaucoup d'incertitude", renchérit une source politique qui observe qu'une telle élection dans un pays hôte à moins de deux mois des JO est sans doute une première.
Interrogée sur le fait de savoir si elle pourrait "accueillir le monde" avec un éventuel Premier ministre d'extrême droite, Anne Hidalgo a répondu: "Moi j'accueillerai le monde en tant que maire de Paris, avec le président de la République, le président du CIO et Tony Estanguet (le président du Cojo, le comité d'organisation)".
À ses côtés, la ministre des Sports et des JO, Amélie Oudéa-Castéra, est déjà entrée en campagne: "Il y a une question à se poser, c'est quelle image veut-on projeter dans le monde ? Je pense que les Français sont conduits à se demander qui ils veulent pour diriger le pays et ils sont également conduits à se demander qui ils veulent pour accueillir le monde", a-t-elle lancé.
"Pas extraordinaire pour l'image"
Mais le gouvernement aura-t-il la tête aux JO alors que la France est en campagne et en crise ?
"Macron va avoir besoin de poids lourds comme (son ministre de l'Intérieur Gérald) Darmanin pour mener la campagne et on a besoin de lui pour la sécurité des JO", estime une source politique, pour qui tout cela "ne tombe pas très bien'".
La sécurisation de cet événement mondial est d'autant plus cruciale depuis les guerres en Ukraine et à Gaza.
Pour Jean-Loup Chappelet, spécialiste de l’olympisme à l’Université de Lausanne, ce n'est "pas extraordinaire pour l'image". Mais, analyse-t-il, "si Renaissance (le parti présidentiel, NDLR) perd, cela ouvrira une période d'instabilité ministérielle à partir du 8-9 juillet. Un nouveau gouvernement éventuel ne sera pas en place avant mi-juillet au mieux, opérationnel plutôt fin juillet, et les choses commenceront concrètement en septembre".
A la tête du comité d'organisation, Tony Estanguet s'est aussi montré rassurant: "On est dans la dernière phase (...) les principales décisions ont déjà toutes été prises, on est dans l'opérationnalité", a-t-il résumé. Comprendre: les JO sont sur des rails, ils vont bien se dérouler.
La vie du Cojo continue. A 46 jours de la cérémonie d'ouverture, il réunissait lundi après-midi comme prévu son conseil d'administration. Devant Thomas Bach, invité à la réunion, le président PS du département de Seine-Saint-Denis Stéphane Troussel, est intervenu pour dire que "les valeurs du JO (étaient) à l'opposé de celles de l'extrême droite aujourd'hui aux portes du pouvoir".
Stéphane Troussel a aussi appelé à ce que "chacun mette tout son énergie pour que (le chef de file du Rassemblement national aux européennes Jordan) Bardella ne soit pas à nos côtés le 26 juillet", a-t-il expliqué à l'AFP.