Mondiaux de judo : Audrey Tcheuméo, le retour du "phénix"
"Ces dernières années, je n'étais pas au top de ma forme. Je n'étais pas au niveau, c'était le trou noir total", raconte à l'AFP la judoka au regard perçant, qui n'a plus foulé un tatami mondial depuis 2018. Mais depuis quelques mois, la native de Bondy semble renaître, en témoignent sa deuxième place au Masters fin 2022 et ses deux victoires en Grand Slam en début d'année, à Paris puis à Antalya (Turquie).
"Je suis un phénix !", lançait-elle après son titre à Paris. "C'est ma nature. J'ai toujours cette rage de vaincre et cet acharnement."
"La victoire à Paris m'a fait du bien", poursuit-elle. "C'était agréable. Gagner à la maison, c'est toujours un kiff, c'était fun. Ça motive, tu gagnes de la confiance, tu te sens pousser des ailes. Ça m'a vraiment boostée pour la suite de la saison (...). Revenir comme ça, c'est un bon début de come-back."
"C'est un exemple"
Arrivée en équipe de France il y a 13 ans, Tcheuméo avait démarré sa carrière en trombe en étant sacrée championne du monde à 21 ans, alors qu'elle n'avait commencé le judo qu'à peine sept ans plus tôt.
Elle avait ensuite confirmé avec deux médailles mondiales en 2013 et 2014 et surtout un titre de vice-championne olympique à Rio en 2016. Mais la montée en puissance de Madeleine Malonga dans sa catégorie des -78 kg l'avait ensuite reléguée au rang de N°2 française et l'avait privée des JO de Tokyo, en 2021.
"C'était dur", admet-elle. "Mais je m'y attendais, ce n'était pas une surprise. C'était dur de voir les autres combattre mais c'est un mal pour un bien, je me suis nourri de ça pour attaquer Paris 2024."
Un état d'esprit et une longévité qui suscitent l'admiration chez les Bleus. "Son premier championnat du monde, elle le fait en 2010! Jusqu'en 2018, elle était N°1, elle s'est fait passer par Madeleine Malonga aux JO de Tokyo et là, elle reprend le lead de la catégorie", décrit son coach en équipe de France, Christophe Massina. "C'est assez exceptionnel quand même !"
Le sentiment est le même pour sa coéquipière Julia Tolofua (+78 kg) : "Audrey, c'est quelqu'un que je respecte beaucoup. Quand j'étais plus jeune, c'était une fille qui m'inspirait déjà quand j'étais en pôle France à Marseille. C'est un exemple, elle était un peu mise sur le côté et, d'un coup, elle explose, elle revient, elle bombe tout", apprécie-t-elle.
"Le but ultime"
Ces années de haut et de bas, Audrey Tcheuméo aime les mettre au service du collectif, du haut de son statut de doyenne du groupe France. "C'est vrai que c'est déjà la plus vieille !", sourit Tolofua, de huit ans sa cadette.
"J'essaye d'aider comme je peux la nouvelle génération", témoigne l'intéressée. "J'aime bien transmettre et faire part de mon expérience. Romane (Dicko) et Shrine (Boukli), ce sont des bébés ! Il y a eu un bon feeling et j'essaye d'être là pour certaines personnes et pour que le groupe marche bien."
Dans la course aux JO de Paris, elle devra faire face à la concurrence de Madeleine Malonga qui, après avoir pris son temps pour digérer l'olympiade précédente, revient à son meilleur niveau, voire celle de Chloé Buttigieg, finaliste au Grand Slam de Paris.
"C'est ça le judo", philosophe-t-elle. "Il faut essayer de se démarquer, c'est une catégorie étoffée, il faut se battre." Dans cette perspective, "Doha sera un test, une leçon pour avancer vers le but ultime", promet-elle.