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Nicolas Ferrand, le bâtisseur "habité" des ouvrages olympiques

AFP
Nicolas Ferrand.
Nicolas Ferrand.AFP
Il n'a pas souvent occupé le devant de la scène. Et pourtant. A 51 ans, Nicolas Ferrand, ingénieur "habité" et "passionné" passé par l'Ecole polytechnique et le MIT de Boston, a orchestré un défi que beaucoup pensaient impossible : livrer dans les temps les ouvrages pour les JO de Paris.

Le challenge est quasiment relevé. Sauf cataclysme, le Village olympique à Saint-Denis, la piscine olympique, mais aussi l'Arena Porte de la Chapelle et les 67 autres ouvrages nécessaires pour les JO seront livrés quasiment à l'heure.

"On a fait 99%, on est au moment de l'atterrissage, les roues sont sorties et sont très proches du tarmac. Mais il faut poser l'avion", résume Nicolas Ferrand à l'AFP.

"Franchement, dans ce milieu, ce que la Solideo a réussi à faire, c'est presque un exploit", estime une source au sein d'une entreprise de bâtiments ayant travaillé sur le Village olympique pour le compte de la Société de livraison des ouvrages olympiques.

"Charisme"

En 2017, la nomination à la direction générale de la Solideo de cet ingénieur, urbaniste et un peu aussi architecte, ancien des cabinets ministériels de Gilles de Robien et de Dominique Perben au début des années 2000, ne soulève pas un enthousiasme particulier.

"On se disait surtout que c'était pas un cadeau", se rappelle un cadre du mouvement olympique. "Construire un village et le reste des ouvrages en sept ans, ce n'était pas gagné."

Mais pour cet ancien élève de l'Ecole alsacienne à Paris, qui s'occupait à l'époque des aménagements de Marne-la-Vallée, c'est le genre de défi qu'il ne peut pas ne pas relever.

Il a d'ailleurs toujours aimé ça. "Les trucs impossibles, ça m'amuse", jubile-t-il. A 25 ans, alors qu'il s'occupe d'un groupe de jeunes scouts, il décide de construire une tour en bois de plus de 13 mètres de haut. Ils vont le faire en quelques jours. Une histoire qu'il aime raconter, en sortant la photo dans son téléphone, avec une passion qu'on devine intacte à chaque fois. "Je crois que j'aime beaucoup raconter des histoires. Je pense que les histoires nous emmènent plus loin", dit-il.

Au tout début de l'aventure de la Solideo, la société créée pour livrer les ouvrages olympiques, la page était blanche. "Je ne mesure absolument rien à ce moment-là", avoue-t-il. Lors de sa rencontre avec Jean Castex, à l'époque délégué interministériel aux JO (Dijop), l'alchimie va prendre, et cimenter son choix.

L'aventure est lancée. Les embûches aussi. La guerre en Ukraine que la Russie déclenche en février 2022 va d'ailleurs le faire vaciller. "Sincèrement j'ai eu un seul moment de doute, c'est en mars 2022", reconnaît-il. Les matériaux qui manquent, l'incertitude qui prend le pas... Un doute qui va durer un mois, mais qui l'a marqué.

Sa force de conviction, son "charisme entraînant", comme dit l'un de ses collaborateurs, sont ses atouts. Sa ténacité aussi. Pour être sûr que chaque salarié de la Solideo ait bien intégré l'objectif de livrer à l'heure, il installe une horloge dans les locaux de l'entreprise décomptant le temps restant avant de livrer les ouvrages. Il annonce le temps restant au début de chaque réunion hebdomadaire.

"Epervier tenace"

Son surnom chez les scouts, "Épervier tenace", lui va comme un gant. Avec un supplément que seuls ceux qui l'ont croisé perçoivent.

"J'ai croisé beaucoup de hauts fonctionnaires dans ma carrière mais aucun n'avait cette passion et la communication de cette passion comme Nicolas Ferrand", dit de lui un ex-fonctionnaire l'ayant croisé à Rennes lorsqu'il s'occupait d'urbanisme à la ville.

"C'est un ingénieur dans l'âme, mais avec ce truc en plus. Il est clairement habité. Il m'avait fait faire le tour de la ville en m'expliquant tous les projets en cours. J'ai rarement travaillé avec quelqu'un d'aussi passionné", raconte cet ex-fonctionnaire.

L'homme ne laisse pas beaucoup de monde indifférent. Jusqu'à ses opposants... "Je l'ai beaucoup pratiqué, et je dois reconnaître que malgré nos désaccords, profonds, il dégage quelque chose. Il a des airs d'illuminé, qui adore les ponts et le bois", assure un des membres du comité vigilance Saint-Denis, une association qui a bataillé contre certains des projets portés par la Solideo dans le 93.

L'après-Solideo, il préfère ne pas encore y penser. Mais une chose est sûre, une fois les JO passés,dans l'anonymat, il ira flâner dans le village, seul. "Je verrai alors si c'est réussi", dit-il.

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