"Le soutien psychologique, c'est le terrain", confesse Peato Mauvaka
QUESTION : Avoir rapidement repris la compétition en club aide-t-il à digérer la déception de la Coupe du monde ?
RÉPONSE : "Ça fait du bien de se défouler sur le terrain, de revoir tous les copains. Je me suis dit que je n'allais pas profiter pleinement des vacances si je partais. Ma chérie m'a dit que si on partait et que j'étais dans cet état-là, il valait mieux que je demande à reprendre. C'est ce que j'ai fait. C'était important pour moi de vite rechausser les crampons, de courir et de transpirer pour oublier ce quart de finale (perdu contre l'Afrique du Sud) plutôt que d'y repenser tout le temps en restant seul à la maison. Je serai en vacances plus tard."
Q : Est-ce toujours en travers de la gorge ?
R : "Les premiers jours, je ne parlais pas. Je restais hyper calme, hyper réservé, je ne rigolais plus trop. Les journées étaient hyper longues, à toujours ressasser des actions où tu te dis que tu aurais pu mieux faire. Je pense que c'était la même chose pour tout le monde. Maintenant que la Coupe du monde est terminée, ça passe mieux."
Q : Avez-vous suivi la fin du tournoi ?
R : "Je n'ai pas regardé les demi-finales et la finale. J'ai vu sur les réseaux qui avait gagné, mais je n'ai pas voulu regarder. C'était trop dur après tout le travail qu'on avait fait pendant quatre mois, pour perdre en quarts... On a passé quatre mois à vivre ensemble et du jour au lendemain, il a fallu s'éparpiller et rentrer chez nous. Alors, je n'imagine même pas en 2011 après avoir perdu en finale (contre les All Blacks, NDLR). Même si eux étaient rentrés ensemble de Nouvelle-Zélande dans l'avion."
Q : Vous a-t-on proposé un soutien psychologique ?
R : "Le soutien psychologique, c'est le terrain. J'avais besoin de recourir, de retrouver l'ambiance du groupe, du vestiaire. De ne pas me retrouver seul à la maison. Certains ont besoin d'être seul, mais moi, j'ai besoin d'être avec tous les frères du vestiaire."
Q : Garderez-vous tout de même quelques bons souvenirs de cette Coupe du monde ?
R : "Les souvenirs, ce sont les derniers matches avec Uini (Atonio) et Romain (Taofifenua), avec qui je suis proche. J'ai commencé avec eux et ils m'ont fait grandir (les deux joueurs ont annoncé leur retraite internationale, NDLR). Je retiens tous les moments passés avec le groupe. Je suis content de mon temps de jeu aussi. Avec la blessure de Julien (Marchand), j'en ai eu plus que ce que je pensais avoir."
Q : Avez-vous le sentiment d'avoir pris une autre dimension lors de ce Mondial réussi d'un point de vue personnel ?
R : "Je ne voulais pas qu'on voie que Julien était absent. J'ai essayé de jouer mon rugby, de ne pas me mettre de pression, comme quand je joue à Toulouse. Ça a bien fonctionné jusqu'à présent et j'espère que ça continuera."
Q : Qu'avez-vous ressenti lorsque le stade Ernest-Wallon vous a ovationné dimanche lors du match contre Bordeaux-Bègles en Top 14 ?
R : "J'avais déjà des frissons lors du speech d'avant-match d'Ugo (Mola, l'entraîneur toulousain) à l'hôtel. J'avais une petite boule au ventre toute la route et j'avais encore des frissons à la descente du bus, j'ai préféré baisser la tête. D'habitude, je n'ai pas trop de pression, pas du tout même. Mais le fait de retrouver le stade après le dernier match en équipe de France… Bizarrement, j'avais un peu de stress. Ça s'est vu sur mon premier lancer en touche. Je n'ai pas compris. J'espère que je ne vais pas relancer d'autres pizzas comme ça par la suite."
Propos recueillis par Sébastien DUVAL