Ski alpin : "Essayer de gagner une descente", le nouveau défi d'Alexis Pinturault
"Gagner une descente ferait de moi l'un des seuls athlètes à avoir gagné dans toutes les disciplines", rappelle le n°1 français qui espère rejoindre dans ce cercle très fermé sept femmes (les Américaines Mikaela Shiffrin et Lindsey Vonn, les Suédoises Anja Paerson et Pernilla Wiberg, la Croate Janica Kostelic, la Slovène Tina Maze et l'Autrichienne Petra Kronberger) et cinq hommes (le Luxembourgeois Marc Girardelli, le Suisse Pirmin Zurbriggen, l'Américain Bode Miller, l'Autrichien Günther Mader et le Norvégien Kjetil-André Aamodt).
Vous avez annoncé il y a quelque temps, vous tournez vers la descente au détriment du slalom. Parlez-nous de cette reconversion...
"J'ai toujours aimé la descente, par contre, je l'ai toujours délaissée au profit du slalom, qui a été une de mes disciplines de prédilection. Ç'a toujours été les disciplines (techniques) que j'ai privilégiées pour marquer le plus de points (en Coupe du monde), au vu de mes objectifs par le passé et jusqu'à récemment, avec les Championnats du monde à la maison. Maintenant que ces objectifs sont derrière moi, j'aimerais consacrer la fin de ma carrière à essayer de gagner une descente, de favoriser la discipline reine."
Qu'est-ce que cela implique ?
"Déjà, il faut établir une bonne stratégie. La descente est un sport d'analyse. Il faut développer une paire de ski compétitif, on travaille beaucoup sur la glisse. Ensuite, il faut travailler sur l'aspect technique, prendre du temps pour s'entraîner dans ces disciplines, devenir de plus en plus compétitif, et prendre des repères. Physiquement, il faut être prêt à ça, potentiellement prendre un peu de poids, et préparer le corps non plus à être explosif mais plutôt puissant."
Qu'est-ce qui vous fait rêver en descente ?
"Ce sont les sensations. La sensation de vitesse, des sauts, où on sent qu'on vole. Et en même temps, c'est un milieu où je me suis toujours très peu entraîné, donc c'est un nouveau cirque blanc, un nouvel environnement que j'ai envie d'explorer. Il y a de l'envie. Il y a des doutes, bien sûr, parce que je peux en avoir sur ma capacité à performer dans cette discipline. Surtout que ça implique d'abandonner le slalom, alors que c'est une discipline où je sais ce que j'ai, ce que j'ai fait. C'est aussi un défi intéressant. Gagner une descente ferait de moi l'un des seuls athlètes à avoir gagné dans toutes les disciplines, même le parallèle, ce serait une performance particulière, singulière, qui me correspondrait bien."
Vous laissez de côté le slalom complètement ?
"Je vais faire ces trois disciplines-là (géant, super-G, descente). Je vais probablement abandonner le slalom. Je ne suis pas sûr à 100 %. Il est possible que je fasse une ou deux courses dans la saison, peut-être même plus si le calendrier le permet."
Avec la retraite de Johan Clarey et Tessa Worley, y a-t-il désormais un creux en équipe de France ?
"Johan Clarey et Tessa Worley, ce sont des grands noms du ski. C'est une page qui se tourne, ça fait de la peine, mais on peut aussi leur dire un grand merci. Ils ont énormément apporté au ski. Par contre, il y a un énorme travail à mener notamment chez les femmes pour recréer une dynamique. Il y a un trou. Tessa arrête, mais aussi Coralie Frasse Sombet et Nastasia Noens. Ces trois athlètes sont dans le Top 30 mondial. En partant, elles enlèvent toutes les possibilités de Top 10 en Coupe du monde dans un futur proche. Ça va être un trou à combler. Ça montre à quel point le chantier est important. La Fédération française de ski va devoir trouver des solutions pour accompagner les jeunes filles de la meilleure des manières vers le haut."
Vous avez 32 ans, est-ce que l'idée de la retraite vous a effleuré l'esprit ?
"Pas spécialement. Je n'irai jamais jusqu'à 42 ans comme Jo (Clarey) a pu le faire (rires), mais je pense que je peux avoir la perspective de 35, 36 ans, en tout cas les Jeux olympiques 2026 de Cortina d'Ampezzo est une destination qui m'inspire."
Propos recueillis par Rémi BOUVERESSE