Biathlon: "Le globe est arrivé plus tôt que prévu", raconte Julia Simon
Q: Vous êtes-vous surprise en remportant ce gros globe ?
R: "Je suis surtout surprise d'avoir fait autant de top 6, autant de podiums. Le globe, oui et non, parce que c'était un objectif à moyen terme, dans les deux, trois ans qui allaient venir, que j'avais annoncé aux coaches, et il est arrivé plus tôt que prévu. Je voulais être régulière, et jouer le classement général, c'était la suite logique, mais ça s'est vraiment passé plus tôt que prévu. J'ai réussi à très bien gérer mes émotions, à prendre course après course, à ne pas m'emballer, et je pense que c'est ce qui fait que j'ai réussi à aller chercher ce globe. C'est un grand pas en avant dans ma carrière. C'est ça de pris ! Maintenant, il faudra réussir à gérer l'après, ce n'est pas facile. J'ai fait la plus belle saison de ma carrière, de loin, et je retiens surtout la manière : c'est là-dessus que je vais essayer de m'appuyer pour les saisons futures. J'ai beaucoup appris cet hiver."
Q: Même secrètement, vous n'en rêviez pas dès cette saison ?
R: "Non, franchement, j'étais vraiment concentrée sur la manière de faire les choses. Une fois que les Mondiaux ont été passés (fin février), je me suis dit: +Maintenant, c'est mon objectif. Il reste trois semaines (en Coupe du monde) et il faut aller le chercher.+ Mais en début de saison, non. J'avais dit aux coaches: +Je veux être plus régulière, arrêter les montagnes russes émotionnelles, de passer d'une 60e place à un podium ou une victoire+."
Q: Comment comparez-vous le titre de championne du monde et le gros globe ?
R: "Ce sont des émotions complètement différentes. Le titre de championne du monde, c'est fort sur l'instant, c'est fort en émotion sur une journée. De la ligne d'arrivée jusqu'au soir avec la cérémonie (protocolaire), c'est la course après la course, c'est un tourbillon. Le globe, c'est sur la longueur. Il faut essayer de gérer les émotions de fin novembre jusqu'à fin mars, ne pas faire l'ascenseur émotionnel. Mais la fierté est la même."
Q: Comment vous sentez-vous au bout d'un hiver aussi plein ?
R: "Je sens vraiment la différence entre les hivers où je me disais +je suis fatiguée+ et là, où je suis vraiment fatiguée mentalement. Il y a eu une décompression. Je sens que c'est comme si j'avais fait la fête pendant quatre jours de suite... Je dors, je dors, je dors, beaucoup. Je suis plus facilement irritable. Je sens que je ne suis pas prête à partir dans un grand débat où on a besoin d'argumenter... Là, j'ai besoin d'être tranquillement chez moi, d'aller bricoler un petit peu dans mon atelier (de menuiserie), de voir ma famille, de faire des choses qui me ressourcent. C'est la première fois que j'ai cette sensation-là. L'an dernier, après les Jeux (olympiques), j'ai coupé plus longtemps (que d'habitude), c'était la première fois que je coupais autant et ça avait été bénéfique : quand j'avais repris, j'avais vraiment l'envie et la motivation. Je pense que je vais faire pareil. Et faire une grosse pause au niveau du tir, au niveau de la tête. Je ne me suis pas dit +je vais reprendre à telle période+, je vais adapter en fonction de comment je me sens."
Q: De quoi rêvez-vous désormais ?
R: "Il n'y a pas de changement. Ce sont des émotions tellement fortes et tellement éphémères... J'avais à peine passé la ligne (d'arrivée) de la poursuite (aux Mondiaux) que c'était déjà terminé... J'ai envie de recommencer. C'est une drogue. On vient de se rendre compte de quelque chose, c'est super, et on veut recommencer. Ce qui me fait vibrer aussi, c'est de voir contents le staff qui bosse pour nous toute l'année, tout l'hiver, les coaches qui supportent nos hauts, nos bas, nos changements d'humeur, nos moments de doute... J'adore ces moments-là et j'ai envie de les revivre. Donc il y aura encore des rêves de médailles, aux Championnats du monde, aux Jeux olympiques, et pourquoi pas aller chercher d'autres globes ?"