Nouvelle chance pour Alexander Zverev, mais Carlos Alcaraz reste le grand favori de la finale
À 27 ans, Alexander Zverev est une des principales figures de la fameuse "NextGen", la génération de joueurs qui était censée écarter du chemin le fabuleux "Big Three" du tennis masculin. En terme purement comptable, c'est un échec. Cette génération n'a remporté que deux US Open grâce à Daniil Medvedev en 2021, et Dominic Thiem, l'année précédente, l'Autrichien dominant en finale... Zverev.
L'Allemand et Stefanos Tsitsipas sont pour l'instant les principaux représentants de la NextGen bredouilles au plus haut niveau. Pourtant, quand on regarde en arrière le palmarès de "Sascha", il n'y a pas de quoi rougir. 22 titres en carrière dont 6 Masters 1000 et deux ATP Finals, et il est également champion olympique en titre. Mais fatalement, gagner un Grand Chelem le ferait passer dans une nouvelle dimension.
Seulement, la NextGen semble déjà passée de mode. Le circuit est dominé par Novak Djokovic, dernier survivant du Big Three, et derrière, Jannik Sinner et Carlos Alcaraz, 22 et 21 ans, qui ont pris possession du circuit ATP et qui seront n°1 et n°2 au classement si l'Espagnol s'impose dimanche. Cette bataille là semble déjà perdue, mais pour l'Allemand, l'essentiel est ailleurs : ne pas terminer sa carrière sans titre en Grand Chelem est un objectif prioritaire.
Sur ce point-là, il est sur la bonne voie. Il a réussi à franchir une certaine barrière en passant outre son bilan de 1-6 en demi-finales de Grand Chelem vendredi, et qui plus est à prendre sa revanche sur Casper Ruud, qui l'avait sorti au même stade en 2023. Le tout alors qu'il était annoncé parmi les principaux favoris, une désignation logique après sa victoire nette et sans bavures au Masters 1000 de Rome.
Malgré tout, son parcours n'est pas réellement convaincant. Il a failli passer l'arme à gauche contre Tallon Griekspoor (mené 4-1 dans la dernière manche). Il a également frôlé la catastrophe contre un Holger Rune hors de forme. Et ses deux victoires sur Alex De Minaur et Ruud sont tout sauf impressionnantes, même si on apprécie sa capacité à conclure les matchs.
Sauf que son adversaire, lui, se présente après avoir tout simplement fait tomber le futur n°1 mondial. Carlos Alcaraz a beau sembler sur un fil physiquement, son bras étant encore au coeur des préoccupations, cela ne l'a pas empêché de se payer Jannik Sinner ce vendredi. Le mental de l'Espagnol est redevenu en acier, et ce point sera crucial quand on sait que Zverev a mené de deux manches et servi pour le match lors de son unique finale majeure, alors qu'Alcaraz a gagné ses deux finales en cinq manches (sauvant une balle de match dans la première).
Mais surtout, l'Espagnol n'a jamais été aussi dangereux lors de sa demi-finale que quand il a pratiqué un véritable tennis de terre battue. Un avantage certain qu'il possède par rapport à son adversaire, et qu'il usera à coup sûr ce dimanche. Mais il existe tout de même un élément tangible en faveur de Zverev : leur unique confrontation à Roland-Garros.
Ce match, c'était le quart de finale de l'édition 2022. Certains diront que l'Espagnol n'était pas le joueur qu'il était aujourd'hui, puisqu'il n'avait pas encore gagné en Grand Chelem. Mais il était tout aussi fort, et son seul tort sur cette partie, c'était de s'être réveillé trop tard. Surpassé par la puissance de l'Allemand, qui a rarement été aussi fort que sur ce tournoi, il avait réussi à dérégler son rival, passant à un point d'arracher une cinquième manche - qui aurait pu tourner en sa faveur - mais difficile de ne pas admettre que Zverev n'était pas le plus fort ce jour là.
On connait la suite, Sascha s'est mis la cheville en Y contre Rafael Nadal en demi-finale, et depuis deux ans, il court après son niveau réel, dont il s'est rapproché à Rome. Mais il peut se targuer d'un avantage psychologique certain avec cette victoire de 2022, mais aussi celle de l'Open d'Australie en janvier dernier (même si Alcaraz a survolé la dernière confrontation à Indian Wells en mars).
Si l'Allemand a tremblé au moment de plier l'affaire en trois manches, il s'est repris et a fini le travail proprement derrière. En imposant sa puissance parfois aveugle, mais aussi en poussant l'Espagnol a commettre bien trop de fautes - un point commun avec Roland-Garros 2022 - et à rendre les armes en quatre manches, une réelle déception pour Alcaraz qui n'a toujours pas brillé en Australie.
On connait la suite, Zverev a gâché une avance de deux sets en demi-finales contre Medvedev, et gâché une belle occasion de retrouver une finale de Grand Chelem. Néanmoins, il n'aura pas eu à attendre longtemps pour avoir une nouvelle chance. La dernière ? Pas nécessairement, techniquement, il a de longues années devant lui. Mais voir Alcaraz gagner un troisième Grand Chelem sur trois surfaces différentes à 21 ans alors que lui est toujours bredouille, voilà qui pourrait lui porter un sérieux coup au moral.
L'aspect mental est sans doute le nerf de cette guerre. Mais difficile de ne pas désigner Alcaraz comme favori. La dynamique de l'Espagnol est indéniable, puisqu'on l'a vu progresser à chaque match. Après des débuts hésitants et un set perdu contre le qualifié Jesper de Jong, il a sonné le réveil et les trois matchs suivants ont été des quasi formalités, notamment en raison de sa maîtrise royale sur les points importants et les tiebreaks. Et quand il a passé un vrai test contre le meilleur joueur de 2024, il a surmonté les embûches, réparti ses efforts impeccablement, et cette stratégie lui a rapporté la victoire.
Si la série est serrée (5-4 pour l'Allemand), si les pronostics le sont également, Carlos Alcaraz part tout de même favori. À condition de mettre les ingrédients, il a toutes les cartes en mains pour marcher sur les traces d'un certain Rafael Nadal. Le poids de cet héritage est sans doute tout ce qui pourrait le faire défaillir, à moins qu'on retrouve le Alexander Zverev au sommet de 2022 et que les deux joueurs nous offrent un sommet de tennis digne d'une finale de Grand Chelem. On ne demande que ça...
