Dominic Thiem en a fini avec sa carrière, retour sur l'un des plus grands regrets du XXIe siècle
C'est à Vienne, à la maison, après une défaite 7-6 (6), 6-2 contre Luciano Dardieri, que Dominic Thiem a donc disputé son dernier tournoi sur le circuit ATP. Un tournoi qu'il a réussi à remporter en 2019, ce qui était alors son 16e titre sur le circuit principal. Le 17e - et dernier - a eu lieu en août 2020, lors du fameux US Open joué à quasi huis clos, Covid oblige, ce qui était alors son premier sacre en Grand Chelem.
Qui aurait pu croire, quand il a soulevé le trophée après avoir remonté deux sets de retard pour terrasser Alexander Zverev, que ce serait non seulement le point culminant de sa carrière, mais également le dernier grand fait d'armes d'un joueur à qui le monde était alors promis ?
Car cette victoire ne sortait pas de nulle part. Bien évidemment, on l'attendait plus sur terre battue, car c'est à Roland-Garros qu'il s'était le plus distingué. C'est là-bas qu'avait eu lieu sa première demi-finale en Grand Chelem, puis sa première finale, et de 2016 à 2019, seuls Novak Djokovic et Rafael Nadal (trois fois) avaient réussi à le stopper sur terre battue. La marque des grands.
Il a été donc catalogué joueur de terre battue, à tort. Car c'est sur les courts en dur qu'il a donc raflé son seul Grand Chelem, mais aussi son unique Masters 1000 (Indian Wells 2019). Et c'est également sur cette surface qu'il a remporté de grands succès contre les meilleurs joueurs du monde, notamment le Big Three (Roger Federer en finale d'Indian Wells, ou Rafael Nadal en finale de l'Open d'Australie 2020, ou encore Novak Djokovic en demi-finale des ATP Finals 2020, sa dernière victoire sur un Top 10 en carrière).
Un joueur polyvalent, mais qui aura payé un lourd tribut à cette fameuse blessure au poignet, qui aura eu lieu - ironie du sort - sur gazon, à Majorque, en 2021. L'Autrichien venait de subir un premier gros revers depuis des lustres en s'inclinant au premier tour à Roland-Garros contre Pablo Andujar. Pour son premier match après cette sortie de route, il s'est blessé au poignet face à Adrian Mannarino. Le début des ennuis, la fin de sa carrière.
Alors qu'il avait terminé son année 2020 3e mondial et finaliste des ATP Finals, il sortait du Top 100 moins de deux ans plus tard. Mais surtout, plus aucun coup d'éclat, plus aucune victoire marquante. Il lui faudra trois ans pour atteindre une dernière finale - chez lui, à Kitzbühel, durant l'été 2023. Une seule victoire sur les trois dernières années, il était temps de dire stop. C'est d'ailleurs ce qui transparaissait dans ses discours de début d'année.
"Je suis de retour depuis deux ans depuis ma blessure, et j'ai terminé à 100 environ en 2022 et à 98 l'année dernière. Si je termine à nouveau l'année à 100, il faudra se demander si tout cela en vaut toujours la peine." Une déclaration qui datait du 30 janvier. Le 10 mai, il annonçait sa retraite. Dans l'intervalle, seulement deux victoires en tableau principal ATP, de quoi lui faire réaliser que non, cela n'en valait pas la peine.
Au moins peut-il être salué pour ne pas avoir insisté trop longtemps. Il n'y a rien de pire que de voir se débattre des anciennes gloires pour ne serait-ce que rentrer en tableau principal de Grand Chelem. C'est ce qui lui est arrivé cette saison, puisqu'à Roland-Garros, malgré son statut d'ancien double finaliste, l'organisation n'a pas jugé bon de lui octroyer une wildcard, et son échec bien triste au deuxième tour des qualifications était finalement un des moments forts de cette édition.
Que reste-t-il de la carrière de Dominic Thiem ? On ne peut vraiment le qualifier de meilleur joueur autrichien de l'histoire, car tant en terme d'aura que de palmarès, Thomas Muster est devant - ils ont collaboré 16 jours ensemble, mais c'est une autre histoire. Néanmoins, il était l'un des étendards de la fameuse "NextGen" avec Stefanos Tsitsipas, Daniil Medvedev et Alexander Zverev, et seuls le Russe et lui sont allés - pour l'instant - chercher un titre en Grand Chelem. Est-ce suffisant ?
Probablement pas. Un prime de 5 ans, pour un seul Majeur et un seul Masters 1000, cela reste trop peu. Car on se souviendra plus de ses défaites, notamment deux fois en finale des Internationaux de France contre Rafael Nadal, au lieu de se souvenir qu'en 2019, il avait tapé en demi-finales Novak Djokovic après un des plus grands matchs de sa carrière.
Mais ce qui reste de l'Autrichien, c'est un surnom : "Dominator". La puissance qu'il dégageait est ironiquement peut-être responsable de la blessure qui a ruiné sa carrière, mais elle était un de ses points forts, et d'autant plus impressionnante avec un revers à une main dont il était un des derniers grands héritiers. Un revers qu'il a changé sur conseils de son coach, avec succès. Frapper des revers à 160 km/h à une main, qui a déjà réussi ?
Avec un tel style de jeu, et s'il avait conservé sa forme physique, il se serait sans doute régalé dans les conditions actuelles. Des duels à 100% contre Jannik Sinner ou Carlos Alcaraz auraient sans doute fait se lever tout un stade et offert une quantité de highlights absolument royale. Et ce titre à Roland-Garros, qui lui a échappé par la faute du meilleur joueur de terre battue de l'histoire, lui aurait sans doute tendu les bras.
Un gâchis, dans la lignée d'un Juan Martin del Potro par exemple, avec la nuance que l'Argentin a été perturbé par les blessures tout au long de sa carrière, alors qu'il n'a fallu qu'une seule fois à l'Autrichien pour perdre pied. Dominic Thiem n'est plus joueur de tennis professionnel, et les regrets seront éternels pour un des joueurs marquants des années 2010, trahi par son physique, et qui s'en va finalement dans un relatif anonymat. Mais au moins, il a pu le faire sur le terrain.