Yoka-Takam : les clés du combat
1/ L'état physique de Takam
À 42 ans, Carlos Takam est devenu un "gate keeper", un boxeur à affronter pour se jauger au niveau mondial. Mais il ne va pas tenir la porte à Tony Yoka. Le natif de Douala a affronté le gratin, même s'il a perdu : Alexandre Povetkin (qui sera contrôlé positif au meldonium, ce qui sera révélé en 2016, soit deux ans plus tard), Joseph Parker (arrivé 5 jours avant et un voyage de 24 heures jusqu'à Aukland), Anthony Joshua (13 jours après le désistement de Kubrat Pulev), Dereck Chisora, Joe Joyce, Arslanbek Makhmudov. Son début de combat sera essentiel car il a déjà eu du mal à terminer. Ce fut par exemple le cas contre Parker, en 2016, alors qu'il était proche de gagner en Nouvelle-Zélande. A priori, plus le combat durera, plus Yoka devrait prendre l'avantage.
La crainte pour les fans, c'est d'assister à un remake du combat entre Yoka et Johann Duhaupas. Le "Reptile" avait aussi de belles références mais, à 39 ans et après une préparation tronquée par des problèmes familiaux, il n'était pas arrivé à son meilleur niveau, alors qu'il avait par exemple tenu 11 rounds contre Deontay Wilder en 2015, preuve d'une capacité notoire à encaisser.
Boxeur à l'hygiène de vie irréprochable, installé à Las Vegas, l'un des épicentres du Noble Art mondial, Takam doit gérer pour tenir 12 reprises. De son endurance dépendra l'issue du combat.
2/ La distance
Tony Yoka mesure 14 cm de plus que Carlos Takam : 2.01 m contre 1.87 cm. Cela se répercute sur l'allonge : 2.08 m contre 2.04 m. Takam devra donc réduire la distance pour toucher Yoka, ce qui entraînera une première bataille pour le centre du ring. La difficulté pour "L'Artiste" sera donc de trouver la bonne distance pour empêcher son adversaire d'avancer et de s'approcher. Son jeu de jambes sera prépondérant Takam connaît ce registre, il y est habitué, qui plus est contre des boxeurs puissants. Néanmoins, il devra faire attention à ne pas se faire contrer, notamment à l'intérieur.
Mais Yoka est-il prêt au combat rapproché ? Tactiquement, Takam est un chef et il a été le premier à faire "déboxer" Joshua qui a eu besoin d'un arbitre légèrement complaisant pour arrêter le combat au 10e round alors que la superstar ne parvenait pas à trouver la solution.
3/ La puissance de Yoka
Le combat contre Martin Bakole avait exposé un cruel manque de punch chez Tony Yoka. Le Congolais, mieux préparé et plus solide, même s'il n'avait pas des pourcentages de KO écrasants, avait pris la mesure de l'Artiste dès les premières reprises. Il avait même confié ne pas avoir insisté car Yoka boxait devant ses enfants et ne voulait pas l'humilier devant eux.
Or pour bouger Takam et son cou de taureau, il faudra frapper juste et fort... sans rechercher à tout prix le KO, au risque d'entrer dans la filière de son adversaire. Souvent épinglé pour sa boxe trop typée "olympique", Yoka n'avait encore affronté aucun boxeur au passif important pour se jauger. Après Bakole, Takam représente un nouveau test grandeur nature pour lui. Il y a 10 ans, ils avaient croisé les gants et l'aîné avait broyé le cadet.
4/ Le menton de Yoka
Contre Carlos Takam, Tony Yoka va mesurer ses facultés d'encaissement. Avec sa boxe compacte, l'ancien détenteur de la ceinture WBC Silver fait mal quand il trouve la cible et la répétition des coups peut saper la confiance de Yoka. Lors de son combat par Bakole, il avait eu le nez cassé très vite, notamment en raison d'une blessure initiale contre un sparring à l'entraînement.
La capacité de résistance de Yoka sera de nouveau mise à l'épreuve et le menton constitue chez beaucoup de combattant une faiblesse difficile à colmater. Takam est un gros frappeur et il faudra briller dans l'art de l'esquive pour ne pas prendre un coup de jus.
5/ La pression sur Yoka
Pour son 48e combat professionnel, Carlos Takam n'a pas grand-chose à perdre. Classé 28e à la WBC, une victoire contre Tony Yoka, 19e, lui permettrait de remonter au ranking et, peut-être, de devenir candidat à une demi-finale mondiale ou à une ceinture mineure. Au-delà de cette hypothétique possibilité, ce duel lui permet aussi d'être mieux connu du public français lui qui n'a plus boxé dans l'Hexagone depuis 2015. Une victoire lui assurerait une certaine forme de reconnaissance, lui qui a représenté le Cameroun aux JO avant d'être naturalisé.
En revanche, pour le champion olympique, c'est tout ou rien. Contre un tel adversaire, il ne mettra pas longtemps pour savoir si son retour dans le ring sera fructueux. Après une préparation manquée contre Bakole, la reprise en main a été obligatoire. Ce sera sans filet pour lui. S'il passe ce test, il retrouvera aussi le soutien des fans ainsi que le chemin de sa conquête d'une ceinture mondiale majeure. Autrement, le rebond sera très difficile pour lui.